C’est inédit, Le Monde est désormais le premier média français à s’allier avec l’entreprise OpenAI, créatrice de ChatGPT. Cet accord est pluriannuel et devrait profiter aux deux parties. Une collaboration marquante quand on sait à quel point les médias français étaient méfiants vis-à-vis de l’intelligence artificielle (IA).
C’est l’entreprise américaine OpenAI qui a annoncé mercredi des partenariats avec le quotidien français Le Monde, mais aussi avec le groupe espagnol Prisa Media. La start-up est à l’origine de l’intelligence artificielle ChatGPT et compte désormais mettre cet outil à disposition des médias. Mais ce ne sont pas les premiers groupes à signer avec OpenAI: l’agence américaine AP et le groupe de médias allemand Axel Springer collaborent déjà avec l’entreprise.
L'actualité en France - bouleversée par l'IA
L’accord s’inscrit sur la durée et devrait permettre aux deux entreprises d’y trouver leur compte. Du côté du média Le Monde, les journalistes vont pouvoir bénéficier du contenu et de la technologie proposée par ChatGPT. Celle-ci viendra compléter les outils déjà utilisés par Le Monde, comme le programme DeepL, qui permet de traduire des articles du français vers l’anglais.
Malgré la richesse de ces outils, Louis Dreyfus, président du directoire du Monde, reste prudent quant à l’utilisation de l’IA: « On ne prendra jamais un outil d’intelligence artificielle pour remplacer du travail journalistique ». Il insiste même au micro de France Inter: « Ça peut le faciliter, ça peut l’accélérer, mais ça n’a pas vocation à remplacer le travail des journalistes.
Nous l’aurons compris, ChatGPT aura un rôle d’assistant plus que de remplaçant au sein du média, de quoi rassurer les abonnés, qui verront eux aussi leur expérience changer.
Mais ce n’est pas seulement Le Monde qui bénéficiera des ressources d’OpenAI. Car la start-up pourra avoir accès aux ressources du quotidien. Autrement dit, les 80 ans d’archives du journal Le Monde seront en libre accès à OpenAI, à l’exception des photos ou des articles issus des contenus d’agences de presse.
Pour le grand public, les effets pourront être directement visibles à travers ChatGPT. Le moteur de réponses les renverra vers l’article intégral dès qu’il utilisera une source venant du journal. Ce qui permettra aux utilisateurs d’avoir accès à un plus grand nombre d’informations et à une multitude d’archives. L’accord entre le journal et Open AI prévoit la mise en exergue du contenu provenant directement des sources du Monde, ce qui permettra au public d’être tenu informé lorsqu’il utilise un contenu provenant du quotidien.
Le Monde, un journal qui ose utiliser l’intelligence artificielle
L’arrivée de l’IA a fait grand débat, surtout à l’intérieur des médias qui étaient, pour un grand nombre pessimistes vis-à-vis de cette innovation. Le Monde est aujourd’hui le premier média français à se lancer dans le grand bain, mais pas sans protection.
L’accord avec OpenAI se place dans la continuité d’une stratégie d’innovations raisonnées. Le but pour Le Monde est de concilier la volonté de découvrir les nouvelles technologiques tout en veillant à protéger l’identité éditoriale du journal.
Le Monde a toujours été un journal précurseur quand il s’agit de l’utilisation de nouvelles technologies. Le média est engagé avec Google, Facebook ou encore X, à l’instar de ses concurrents. Ce qui permet au groupe de se faire rémunérer lorsque son contenu est repris sur ces plateformes ou ces réseaux sociaux.
Le Monde accueille donc ses 600 000 abonnés dans une nouvelle ère. Mais reste clair sur un point: l’indépendance éditoriale. Les abonnés n’ont donc pas de soucis à se faire, car d’après Le Monde: « Ce nouvel accord n’entravera en rien la liberté d’enquête de nos journalistes ».
Doit-on se méfier d’un média contrôlé par l’intelligence artificielle?
Malgré l’engouement suscité par l’alliance entre Le Monde et OpenAI, il est nécessaire d’adopter une approche prudente envers l’utilisation de l’intelligence artificielle dans les médias.
Selon des chercheurs du CHU Sainte-Justine et de l’Hôpital de Montréal pour enfants, qui ont testé des IA comme ChatGPT, un taux d’erreur très élevé a été découvert.
Les résultats de l’étude ont révélé des références scientifiques inventées, des conseils erronés, des informations inexactes et des citations erronées. Ces constatations mettent en lumière les limites de la fiabilité de l’intelligence artificielle dans la production de contenu journalistique.
Bien que cette collaboration puisse offrir de nouvelles perspectives et améliorer l’efficacité du travail journalistique, il est impératif de reconnaître et de traiter ces lacunes avec précaution. En conséquence, il est essentiel de veiller à ce que cette alliance soit utilisée de manière responsable, en maintenant toujours les normes journalistiques et l’exactitude des informations diffusées par Le Monde.
L’intégration de nouvelles technologies dans divers aspects de notre vie quotidienne peut avoir des conséquences réelles et parfois indésirables pour les individus.
Une illustration récente de ces impacts est mise en lumière par le député français Eric Bothorel, qui a porté plainte contre ChatGPT en 2023 auprès de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil). Cette action vise à enquêter sur d’éventuelles infractions au Règlement général européen sur la protection des données (RGPD) après que le robot conversationnel a commis plusieurs erreurs lors de ses interactions avec le député.
Les captures d’écran des échanges révèlent que ChatGPT a fourni des informations incorrectes sur le profil d’Eric Bothorel, mentionnant de fausses données concernant sa date de naissance, son lieu de naissance, son parcours professionnel et son engagement politique.
Ces erreurs démontrent les limites de l’IA et soulèvent des préoccupations quant à son utilisation dans des domaines sensibles où la précision et la fiabilité sont primordiales.