Quand une polytechnicienne s’implique en politique pour devenir ministre chargée des transports, puis Première Ministre, il y a de quoi se demander pourquoi Élisabeth Borne a accepté de devenir Ministre chargée de l’Education Nationale. Et pour cause. Depuis son passage à la tête du ministère, Élisabeth Borne a multiplié les annonces pour réformer le système scolaire français. Ses décisions précédentes au sujet des retraites et de l’immigration lui ont d’ailleurs valu le sobriquet de “Madame 49.3”, témoignant de l’impopularité de certaines mesures pourtant clés pour l’avenir des jeunes français.
Les nouvelles idées de réforme quant à l’Education Nationale d’Élisabeth Borne sont encore assez mal perçues par le public puisqu’elles annoncent un nouveau nivellement par le bas.
Au revoir cher brevet, Mme Borne ne veut plus de vous.
L’annonce de l’abandon du « brevet couperet » pour entrer en seconde marque une rupture importante avec les réformes initiées par le précédent gouvernement. Si l’obtention du brevet reste valorisée, elle ne sera plus une condition obligatoire pour accéder au lycée. Cette décision a été largement saluée par les syndicats, qui voyaient dans cette mesure un risque de retour en arrière pour la démocratisation scolaire.
Le niveau d’exigence du brevet sera renforcé par une modification de la répartition entre le contrôle continu et l’examen final, qui représentera désormais 60 % de la note totale. Des dispositifs de soutien, comme les stages de réussite et les classes de prépa-seconde, seront évalués pour étendre leur efficacité.
Si en théorie cela paraît être une bonne idée, il faut bien se demander si cela ne va pas encore promouvoir la médiocrité chez les élèves français. Faut-il réellement que tous les élèves puissent passer au niveau supérieur si leur niveau est trop bas pour réussir un brevet? Les résultats inquiétants des performances académiques en France indiquent qu’il serait temps de rajouter des obstacles aux élèves médiocres.
En 2021, une étude nommée “Progress in International Reading Literacy Study” a cherché à voir quel était le niveau en compréhension écrite et lue d’élèves à travers le monde. Les élèves français de CM1 ont obtenu un score moyen de 514 points en compréhension de la lecture, contre 520 points en 2016, marquant une baisse catastrophique. La France se situe derrière des pays comme l’Irlande (566 points) et la Pologne (549 points). Pour le pays de Rimbaud, Voltaire et Hugo, c’est triste comme constat.Plus préoccupant, 21% des élèves n’atteignent pas le seuil minimum de compréhension en lecture, contre seulement 15% dans l’Union européenne.
Une enquête de la Cour des comptes de 2022 révèle également que 27% des collégiens en fin de 3ᵉ ne maîtrisent pas correctement les compétences de lecture et d’écriture nécessaires pour entrer en seconde générale ou professionnelle. Il est donc peut-être utile de garder des examens en présentiel comme le brevet qui rajoutent une pression aux élèves.
Le Recrutement et la gestion des effectifs, bien affectés.
Face à une baisse prévue de 11 902 élèves dans le secondaire à la rentrée 2025, sûrement dûe à une baisse de natalité, Élisabeth Borne a décidé de créer 324 postes supplémentaires dans le second degré et de réduire la suppression initialement prévue de postes dans le primaire à 470. Il s’agit donc de renforcer l’encadrement des élèves tout en améliorant la gestion des absences grâce à des brigades de remplacement renforcées.
Cette décision est en somme assez positive mais il faut se rappeler que s’il y a un problème de fond avec la manière dont les enseignants français opèrent, cela ne changera rien à la situation actuelle, bien que cela puisse limiter des inégalités territoriales. D’autant plus que le métier d’enseignant n’est plus vraiment attractif. L’Institut Montaigne estimait en 2022 qu’il faudrait une augmentation de salaires de 20 à 30% pour rendre le métier véritablement compétitif et attirer les meilleurs talents pour enseigner en ville ou en province.
Au revoir les longues vacances d’été, Élisabeth Borne n’en voit pas l’utilité
Un des seuls avantages du métier de professeur va être réduit. Élisabeth Borne a rouvert le débat en proposant de réduire les vacances d’été de huit à six semaines, arguant que les coupures longues accentuent les pertes de niveau chez les élèves les plus fragiles. Cette proposition vise à nous rapprocher des systèmes en vigueur en Allemagne ou au Royaume-Uni.
Les syndicats enseignants, comme le Snes-FSU, considèrent que cette proposition fait diversion par rapport aux véritables problèmes, tels que le manque d’attractivité du métier ou la surcharge des emplois du temps des élèves.
Pour l’instant, la ministre a précisé que cette mesure ne serait pas appliquée avant 2026, laissant ainsi place à une concertation avec les acteurs du secteur.
L’éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle (EVARS)
L’une des décisions les plus médiatisées en ce moment concerne la refonte du programme d’éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle (EVARS). Ce programme, obligatoire de la maternelle au lycée, vise à aborder des sujets essentiels comme le consentement, la prévention des violences sexuelles, et les effets de la pornographie et bien sûr la controversée identité de genre. Élisabeth Borne a défendu ce terme en rappelant qu’il est inscrit dans le Code pénal comme une notion protégeant contre les discriminations.
La nouveauté principale réside dans l’organisation de trois séances annuelles pour tous les élèves. Les enseignants auront la responsabilité de conduire ces sessions, avec l’appui possible de partenaires extérieurs au collège et au lycée.
La mise en place de ce programme n’a pas été sans embûches. Bien qu’obligatoire depuis 2001, seules 15 % des écoles l’appliquent effectivement. La ministre s’engage donc à ce que le programme entre pleinement en vigueur dès la prochaine rentrée scolaire, une mesure saluée par les associations de parents mais critiquée par certains groupes politiques.
En principe, la prévention est utile. Mais c’est bien parce qu’il s’agit d’un sujet délicat qu’il devrait être avant tout abordé par les parents plutôt qu’à l’école, où la sexualité ne devrait pas être un sujet mis au premier plan.