La Thaïlande évoque immédiatement des plages paradisiaques, des temples somptueux, une cuisine raffinée et des éléphants majestueux. Chaque année, des millions de touristes affluent, des routards occidentaux aux familles résidant dans des complexes hôteliers de luxe. Bangkok, la capitale, figure régulièrement parmi les villes les plus visitées au monde.
Mais derrière cette image de carte postale se cache une réalité bien moins reluisante : la saison des brûlis. Ce phénomène environnemental, qui passe inaperçu aux yeux de la plupart des visiteurs, transforme pourtant la Thaïlande en un véritable nuage toxique pendant plusieurs mois de l’année. Poussant parfois les autorités à des mesures d’urgence drastiques, cette pollution saisonnière suscite de nombreuses interrogations : pourquoi persiste-t-elle, malgré son interdiction officielle ? Et pourquoi le gouvernement semble-t-il impuissant face à cette crise récurrente ?
Une pollution si grave qu’elle paralyse la Thaïlande
Il y a quelques jours à peine, la situation est devenue si critique que les autorités thaïlandaises ont été contraintes de fermer plus de 350 écoles à Bangkok, en raison d’une pollution insupportable. En désarroi, elles ont également rendu gratuits tous les transports publics dans l’espoir de limiter le nombre de voitures en circulation et de réduire l’émission de polluants. Ces mesures, bien qu’extrêmes, ne sont malheureusement qu’un pansement sur une plaie béante. Car la pollution en Thaïlande n’est pas seulement due aux gaz d’échappement des véhicules ou aux industries polluantes : elle trouve sa source dans une pratique ancestrale que le gouvernement peine à enrayer.
Les brûlis agricoles , source de pollution
La principale cause de cette catastrophe est la “saison des brûlis“. Chaque année, les agriculteurs, principalement dans le nord du pays, incendient leurs champs pour préparer la nouvelle saison de plantation. Cette méthode leur permet également de se débarrasser des cultures invendues et des déchets agricoles. Bien que strictement interdite par la loi, cette pratique continue de prospérer en raison de son coût très faible et de son efficacité.
Les régions ne sont pas touchées en même temps, car le climat varie selon la géographie du pays. Ainsi, Bangkok connaît ses pires jours de pollution en janvier, tandis que Chiang Mai, autre destination touristique prisée, est asphyxiée entre mars et mai. À terme, peu importe la saison ou la région, les brûlis restent une bombe à retardement pour la qualité de l’air du pays.
Un agriculteur anonyme du nord de la Thaïlande confie : « Je sais que ce n’est pas bon pour l’environnement, mais brûler est la seule solution abordable pour nous. Sans cela, nous ne pourrions pas nous en sortir économiquement. » Cette dépendance à la combustion des résidus agricoles montre bien l’impasse dans laquelle se trouve la Thaïlande.
Un trafic chaotique qui empire la situation en Thaïlande
Au-delà des brûlis, un autre facteur amplifie la pollution : le transport. En Thaïlande, une majorité des habitants utilise des motos, des tuk-tuks et des véhicules souvent très anciens, bien loin des normes environnementales occidentales. Ces engins, parfois chargés à l’excès de passagers ou de marchandises, engendrent des embouteillages monstres où les citadins restent coincés pendant des heures, inhalant un air saturé de particules fines.
Le pays affiche également un taux d’accidents routiers alarmant. D’après le cinquième rapport mondial sur la sécurité routière publié par l’OMS en 2023, la Thaïlande présentait un taux de mortalité routière de 25,4 pour 100 000 habitants en 2021, ce qui en fait l’un des pires bilans d’Asie et des pays à revenu intermédiaire.
Dans certaines régions comme Chiang Mai, la pollution atteint des sommets insupportables. Entourée de montagnes, la ville devient une véritable chambre à gaz naturelle. L’air pollué s’y retrouve piégé, et l’absence de pluie en hiver aggrave encore la situation. D’après le site IQAir, qui surveille la qualité de l’air en temps réel, Bangkok affichait récemment un indice de pollution de 120, un niveau considéré comme dangereux pour la santé.
Que fait le gouvernement?
Confronté à cette crise, le gouvernement thaïlandais a récemment intensifié ses mesures. Il a ordonné aux gouverneurs de province d’arrêter les agriculteurs qui ne respectent pas l’interdiction des brûlis, sous peine de sanctions. Dans une déclaration officielle, les autorités ont prévenu : « Dans chaque province, si vous tolérez les feux de culture ou ne mettez pas en place de mesures préventives, vous serez puni. »
Plus de 1,1 million de masques de protection contre la pollution ont été distribués dans tout le pays. Le ministère de la Santé suit de près les populations vulnérables, telles que les enfants et les femmes enceintes, tandis que les conducteurs sont sommés de respecter des normes d’émission plus strictes.
Que faire si vous êtes en Thaïlande pendant la saison des brûlis ?
Si vous êtes touriste ou résident permanent en Thaïlande, mieux vaut prendre des précautions. Se munir d’un masque de haute qualité et vérifier régulièrement les indices de pollution sont des réflexes à adopter. Pour ceux qui vivent sur place, investir dans un purificateur d’air est un choix judicieux.
Si vous prévoyez de voyager dans le pays, il est conseillé d’éviter les régions les plus touchées durant cette période et de privilégier les zones côtières, où l’air est plus respirable. Car même si la Thaïlande s’efforce de lutter contre ce fléau, la réalité est que, chaque année, la saison des brûlis reviendra, apportant avec elle son lot de fumées toxiques et de perturbations majeures.