La situation politique au Bangladesh ne s’est pas améliorée récemment. Une montée de la violence et des tensions politiques mettent en péril les acquis de la révolution étudiante ayant conduit à la chute du gouvernement de Sheikh Hasina en août dernier.
Le général Waker-Uz-Zaman, chef de l’armée, a tiré la sonnette d’alarme et a prévenu le pays qu’un coup d’État risquait d’éclater. Lors d’une cérémonie militaire commémorative, il déclare : “Je vous préviens aujourd’hui afin que plus tard, personne ne puisse dire que je n’avais pas lancé un avertissement.”
Un coup d’État possible suite à une recrudescence d’actes criminels et de violence
Un coup d’État ne surprendrait pas les autorités du Bangladesh dans la mesure où la stabilité politique et la sécurité des citoyens a été remise en cause depuis l’année dernière.
L’opération “Devil Hunt” (“Chasse au diable”), lancée le 8 février, a conduit à l’arrestation de plus de 8 600 individus, accusés par le gouvernement de chercher à “déstabiliser” le pays. Parmi les personnes visées figurent des membres présumés de gangs liés à l’ancien pouvoir et des figures influentes de la sphère politique. Alors que des accusations de disparitions forcées, de tortures et d’exécutions extrajudiciaires se multiplient, Waker-Uz-Zaman a appelé à des enquêtes et à la justice : “Les forces de sécurité doivent rendre des comptes. Sans cela, nous resterons prisonniers du même cycle.“
L’armée bangladaise, bien que dotée de pouvoirs judiciaires similaires à ceux de la police depuis la révolution, se retrouve dans une situation délicate. Alors que le général Waker-Uz-Zaman affirme vouloir restaurer la stabilité avant de se retirer dans ses casernes, les tensions persistent. Des factions étudiantes rivales se sont affrontées sur un campus universitaire la semaine dernière, illustrant l’état de discorde qui règne entre les groupes ayant pourtant joué un rôle clé dans le soulèvement contre Hasina.
Des manifestations violentes ont éclaté, ciblant des biens appartenant à la famille de l’ancienne première ministre.
Le chef de l’armée a affirmé que ces troubles dépendaient du peuple : “Si vous ne dépassez pas vos différences et continuez à vous chamailler, l’indépendance et l’intégrité du pays seront en danger.”
Il a pointé du doigt une classe politique obsédée par les querelles internes, permettant ainsi aux “mécréants” d’exploiter cette situation de chaos. Sans nommer directement de responsables, il a dit que l’anarchie actuelle est le fruit de décisions et d’actions internes et que “le désordre auquel nous assistons est fabriqué par nous“.
Le processus de transition politique est lui aussi sujet à interrogations. Muhammad Yunus, prix Nobel et chef du gouvernement de transition, a hérité d’un système administratif et judiciaire en décomposition.
Alors qu’il prévoit des réformes en profondeur pour éviter un retour à l’autocratie, il estime que des élections ne pourront se tenir qu’à la fin de l’année 2025 ou début 2026. Waker-Uz-Zaman soutient cette approche : “Dès le début, j’ai dit qu’il faudrait 18 mois pour organiser un scrutin. Nous sommes sur cette voie.”
La pression politique s’intensifie avec la démission de Nahid Islam, figure étudiante emblématique et ancien ministre des Télécommunications, qui prépare le lancement d’un nouveau parti. Ce départ intervient alors que le Bangladesh tente de se restructurer après une décennie et demie sous le règne de Sheikh Hasina.
Pendant ce temps, les discours du général Waker-Uz-Zaman résonnent comme un appel à la responsabilité et à la stabilisation du pays. Son engagement semble clair : “Je veux simplement ramener le pays à un point stable et ensuite prendre des vacances. Après cela, nous retournerons dans nos casernes.” Reste à savoir si l’histoire mouvementée du Bangladesh lui permettra d’honorer cette promesse.