Le trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) est une condition neurodéveloppementale qui touche un nombre croissant d’enfants et d’adultes en France.
Ce phénomène suscite une préoccupation croissante, tant dans les milieux éducatifs que médicaux. Environ 5 % des enfants en âge scolaire seraient concernés, selon les estimations, ce qui représente environ 1 à 2 élèves par classe.
Le nombre réel pourrait être plus élevé, car le TDAH reste sous-diagnostiqué, en particulier chez les filles et les adultes. Alors que certains qualifient ce trouble de handicap moderne, il reflète aussi les défis auxquels sont confrontées les sociétés contemporaines, notamment en matière de santé mentale et de prise en charge.
Le Parisien Matin a obtenu des réponses du Dr. Sophie François
Le TDAH est en hausse nette en France
En France, le TDAH est de plus en plus diagnostiqué, en particulier chez les enfants. Selon une étude de la Haute Autorité de Santé (HAS), environ 400 000 enfants souffrent de TDAH en France, ce qui représente environ 3,5 à 5 % de la population infantile.
Chez les adultes, les chiffres sont moins clairs, mais on estime qu’entre 2 et 3 % des adultes en France seraient également affectés. Il faut retenir que le diagnostic chez les adultes est plus complexe, car les symptômes peuvent s’atténuer ou se présenter sous des formes différentes avec l’âge.
Les garçons sont diagnostiqués beaucoup plus fréquemment que les filles, souvent en raison de la manière dont les symptômes se manifestent. En général, les garçons ont tendance à exprimer le TDAH par des comportements plus visibles et perturbateurs, comme l’hyperactivité et l’impulsivité. Les filles, en revanche, peuvent présenter des symptômes plus discrets, comme l’inattention, ce qui conduit souvent à un diagnostic tardif ou manqué.
De nombreux experts considèrent le TDAH comme un “handicap moderne”, non pas parce qu’il est nouveau, mais parce que les exigences du monde contemporain amplifient ses effets. Les rythmes de vie accélérés, la surcharge cognitive liée aux nouvelles technologies, et les attentes scolaires ou professionnelles croissantes rendent la gestion des symptômes plus difficile pour les personnes atteintes de TDAH.
Dr. Sophie François, psychiatre et spécialiste du TDAH, explique “Dans nos sociétés modernes, où tout doit aller vite et où l’on attend des enfants qu’ils soient concentrés pendant de longues heures à l’école, le TDAH devient un véritable défi. Autrefois, ces enfants auraient pu trouver des environnements plus adaptés à leur profil, mais aujourd’hui, les exigences académiques et sociales les poussent rapidement dans des situations d’échec.”
Les adultes atteints de TDAH sont également touchés, car le monde du travail, qui valorise la productivité, la gestion du temps et l’efficacité, est souvent mal adapté à leurs besoins. Ils peuvent rencontrer des difficultés à organiser leurs tâches, à respecter des délais stricts ou à maintenir leur concentration pendant de longues périodes.
Quelle vie pour ceux qui ont un TDAH?
Le TDAH se manifeste par une combinaison de trois types de symptômes principaux : l’inattention, l’hyperactivité, et l’impulsivité. Ces symptômes varient en intensité d’une personne à l’autre.
Il est souvent difficile pour une personne atteinte de TDAH de maintenir son attention pendant une longue durée, en particulier sur des tâches monotones ou répétitives. L’oubli fréquent des détails, le manque d’organisation, et les erreurs dues à la distraction sont des signes communs.
Les personnes concernées peuvent avoir du mal à rester immobiles, elles ont besoin de bouger constamment, ce qui peut poser problème dans un cadre scolaire ou professionnel se manifeste par une incapacité à retenir ses actions ou paroles, ce qui peut mener à des interruptions fréquentes lors des conversations ou à des décisions prises sans réfléchir aux conséquences.
L’impact du TDAH sur la vie quotidienne est important. Marie, une mère dont le fils de 8 ans a été diagnostiqué, témoigne : “Mon fils a toujours eu du mal à rester concentré. À l’école, il bougeait sans arrêt et se faisait souvent réprimander. Ce n’était pas qu’il ne voulait pas écouter, mais il n’en était tout simplement pas capable. Le diagnostic a été un soulagement, car cela a permis de mettre des mots sur ses difficultés.”
La prise en charge du TDAH en France reste un sujet controversé. Le traitement combine généralement des thérapies comportementales et, dans certains cas, des médicaments, notamment des psychostimulants comme le méthylphénidate (connu sous le nom de Ritaline). Ce médicament agit en augmentant la concentration de certains neurotransmetteurs dans le cerveau, ce qui aide à améliorer l’attention et à réduire l’hyperactivité. Son utilisation est parfois critiquée, en raison des effets secondaires possibles, notamment la perte d’appétit, des troubles du sommeil et une baisse de l’humeur.
Le Dr. Sophie François rappelle “Il est important de ne pas diaboliser les médicaments. Chez certains enfants, ils peuvent vraiment améliorer leur qualité de vie. Mais il faut les accompagner d’un suivi psychologique et pédagogique. Trop souvent, les familles sont laissées à elles-mêmes après la prescription.”
Le débat sur la surmédicalisation des enfants TDAH est récurrent, certains experts s’inquiétant de la tendance à prescrire des médicaments sans explorer d’abord des solutions non pharmacologiques, comme les ajustements scolaires ou la thérapie cognitive.
Le TDAH a aussi un coût pour la société. En France, les enfants atteints de TDAH ont souvent des difficultés scolaires, ce qui peut conduire à un taux d’abandon scolaire plus élevé et à des besoins accrus en soutien éducatif. À l’âge adulte, les personnes non diagnostiquées ou mal prises en charge peuvent avoir des difficultés à maintenir un emploi stable ou à gérer des relations personnelles. Ces conséquences peuvent entraîner une pression économique supplémentaire sur le système de santé et les services sociaux.
Un rapport récent a montré que les coûts directs et indirects associés au TDAH pourraient représenter plusieurs milliards d’euros chaque année en Europe, en tenant compte des coûts médicaux, des pertes de productivité et des dépenses liées à l’éducation spécialisée.