Une baisse des taux qui pourrait soutenir le marché immobilier: La récente décision de la Banque Centrale Européenne (BCE) de réduire ses taux directeurs, effective depuis le 6 juin 2024, représente un tournant majeur pour le marché immobilier en France. Après une période marquée par des taux d’intérêt élevés, cette baisse pourrait bien redynamiser le secteur et offrir de nouvelles opportunités aux ménages.
La baisse des taux : un soulagement pour les emprunteurs et le marché immobilier
La BCE a annoncé une baisse de ses taux directeurs de 0,25 point, réduisant ainsi le taux de refinancement à 4 % et celui des dépôts à 3,75 %. Cette décision, motivée par un ralentissement de l’inflation, était attendue depuis plusieurs mois. Les taux des crédits immobiliers, qui avaient grimpé à des niveaux records entre janvier 2022 et janvier 2024, passant de 1,07 % à 4,12 %, commencent à baisser. En conséquence, “on emprunte en moyenne à 3,70 % sur 20 ans”, explique Sandrine Allonier, analyste en immobilier. Elle prévoit même un recul à 3 % d’ici la fin de l’année.
Pour les ménages souhaitant acheter un bien immobilier, cette fluctuation est une excellente nouvelle. Les banques, désormais en mesure d’emprunter à des taux plus bas auprès de la BCE, peuvent offrir des prêts immobiliers plus abordables. Cela pourrait encourager les emprunteurs à revenir sur le marché après une année 2023 marquée par une forte hausse des taux et un ralentissement des transactions.
Une réduction des taux bénéfique mais insuffisante pour une reprise complète
Si la baisse des taux est bienvenue, elle ne suffira pas à elle seule à relancer complètement le marché immobilier. En 2023, seulement 875 000 transactions ont été enregistrées, contre 1,115 million l’année précédente. Henry Buzy-Cazaux, président fondateur de l’Institut du Management des Services Immobiliers, estime que pour retrouver un rythme de croisière, “le marché immobilier a besoin d’un recul des prix moyens de 5 à 7 % sur l’année 2024”.
De plus, les prix élevés des logements et la faiblesse de l’offre freinent encore le marché. “Les vendeurs doivent baisser leurs prix, puisqu’on a des prix qui sont encore largement trop élevés par rapport à la capacité d’emprunt des Français”, stipule Sandrine Allonier. La baisse des taux directeurs est donc une première étape, mais elle doit s’accompagner d’une correction des prix pour avoir un effet significatif sur les ventes.
La prudence de la BCE face à l’inflation et aux perspectives économiques
La BCE reste prudente quant à de nouvelles baisses de taux. L’inflation dans la zone euro a augmenté à 2,6 % en mai 2024, contre 2,4 % en mars et avril. Cet accroissement pourrait freiner ses intentions de réduire davantage les taux à court terme. Holger Schmieding, économiste en chef de la Berenberg Bank, suggère que la BCE pourrait n’abaisser les taux qu’une fois par trimestre, avec pour objectif de les ramener à 3,25 % d’ici la fin de 2024. Cette approche permettrait de gérer l’inflation tout en soutenant l’économie.
Cependant, cette circonspection contraste avec les attentes des professionnels de l’immobilier, qui espèrent des taux de crédit plus bas pour dynamiser le marché. “Sans revenir aux taux artificiellement bas des années 2017-2022, on peut raisonnablement espérer retrouver des taux de crédit moyens avoisinant 3,30 % en fin d’année”, estime Caroline Arnauld, directrice générale du courtier CAFPI.
Les investisseurs institutionnels et les épargnants face à la baisse des taux
La baisse des taux directeurs profite également aux investisseurs institutionnels. “Une baisse des taux pourrait être de nature à améliorer la rentabilité des transactions immobilières et à rendre l’investissement immobilier plus attractif”, se réjouit Alexandra Krystalogianni, Director Insight and Investment Strategy EMEA chez Avison Young. Les prix et les volumes de ventes des actifs immobiliers commerciaux, logistiques ou de bureaux ont dégringolé ces deux dernières années. L’accalmie des taux pourrait relancer l’activité sur ces marchés, ainsi que les collectes sur des produits tels que les OPCI (Organisme de placement collectif en immobilier) ou les SCPI (Société civile de placement immobilier).
Pour les épargnants, en revanche, la baisse des taux est une mauvaise nouvelle. Le livret A, dont le taux avait grimpé à 3 %, pourrait voir sa rémunération diminuer. Cela pénalise ceux qui cherchent à faire fructifier leur épargne dans un contexte de taux bas.
L’amenuisement des taux de la BCE offre un souffle nouveau au marché immobilier français, mais elle reste insuffisante pour une relance complète. Si cette décision permet de rendre les prêts plus abordables et de soutenir l’économie, elle doit s’accompagner d’une correction des prix et d’une augmentation de l’offre pour avoir un impact durable. Les investisseurs institutionnels peuvent se réjouir de cette rémission, tandis que les épargnants devront faire face à une rémunération moins attractive de leur épargne. La prudence de la BCE quant à de futures baisses de taux souligne la complexité de la situation économique actuelle, marquée par des tensions inflationnistes et des perspectives incertaines.