Le 13 février 2025, l’Assemblée nationale a adopté en première lecture une proposition de loi portée par Gabriel Attal, ministre de l’Éducation nationale et de la Jeunesse, visant à durcir la justice des mineurs.
Ce texte entend répondre aux violences urbaines de l’été 2023, dont les émeutes consécutives à la mort du jeune Nahel, tué lors d’une intervention policière à Nanterre, ont été l’un des déclencheurs.
Pour les partisans de droite, cette mesure est fondamentale pour assurer une véritable justice sans promouvoir le recours à lexcuse de minorité pour échapper aux sanctions.
La Justice des Mineurs ne sera plus la même suite à cette réforme.
Les événements tragiques de 2023 ont fait basculer la France. La mort de Nahel, un jeune homme de 17 ans, tué par un policier à Nanterre. Les émeutes qui ont suivi ont vu l’embrasement de plusieurs quartiers sensibles à travers le pays,ce qui a fait croître le sentiment de crainte et d’impuissance face à la montée de la délinquance juvénile.
La majorité présidentielle a alors porté la proposition de loi visant à accélérer et renforcer la répression des mineurs auteurs de délits graves. Les objectifs de cette réforme sont de renforcer l’autorité, d’accélérer la procédure judiciaire pour les jeunes délinquants et de rendre la justice plus rapide et plus efficace.
Cette réforme contient les éléments suivants:
La comparution immédiate pour les mineurs de plus de 16 ans
L’instauration d’une procédure de comparution immédiate pour les mineurs de plus de 16 ans est l’un des points les plus sensibles du texte.
Actuellement, un mineur jugé doit attendre un délai de trois mois après sa garde à vue avant que son jugement ne soit rendu. Ce processus est suivi, le cas échéant, d’une deuxième audience pour déterminer la sanction. Dans le texte proposé, cette procédure serait accélérée, offrant ainsi aux juges la possibilité de juger un mineur immédiatement après sa garde à vue. Cette mesure ne concerne toutefois que les mineurs de plus de 16 ans déjà connus de la justice, pour lesquels un placement en détention provisoire est requis.
Cette réforme a été justifiée par Gabriel Attal et ses soutiens comme un moyen d’éviter un sentiment d’impunité qui, selon eux, affecterait les jeunes délinquants en raison des délais trop longs avant le jugement.
Certains magistrats et acteurs du système judiciaire, comme Mathieu Moreau, éducateur à la Protection judiciaire de la jeunesse, affirment que la procédure actuelle, bien qu’imparfaite, permet d’apporter un suivi éducatif entre les audiences, ce qui est primordial pour la réhabilitation des jeunes délinquants. « La rapidité et l’efficacité, on l’a déjà », déclare Moreau. Il estime que l’introduction de la comparution immédiate pourrait entraîner une rupture de la prise en charge éducative des jeunes, réduisant ainsi les chances de réinsertion.
La remise en question de l’excuse de minorité systématique après 16 ans
Autre élément central de la réforme : la fin de l’excuse de minorité systématique pour les mineurs de plus de 16 ans ayant commis des délits graves et multirécidivistes.
Traditionnellement, l’excuse de minorité permettait aux mineurs de bénéficier de peines moins sévères que celles infligées aux adultes.
Ce principe, qui existe depuis l’ordonnance de 1945, a été largement critiqué ces dernières années par ceux qui estiment qu’il n’est plus adapté aux réalités de la délinquance juvénile moderne.
Le texte propose donc de limiter cette excuse pour les jeunes auteurs de crimes violents tels que les agressions sexuelles, les atteintes à la vie ou les vols avec violence. Si la mesure est adoptée, le juge devra justifier spécifiquement l’application de l’excuse de minorité dans ces cas particuliers.
Les sanctions renforcées à l’égard des parents de mineurs délinquants
Le texte de loi prévoit des sanctions renforcées pour les parents de mineurs délinquants.
Si le mineur est reconnu coupable d’un délit, le juge pourra imposer une amende civile aux parents qui ne répondraient pas aux convocations pour les audiences.
L’article 3 stipule que les deux parents, même si leur enfant vit uniquement avec l’un d’eux, seront responsables solidairement des dommages causés par leur enfant. L’objectif: Responsabiliser les parents et de les inciter à prendre une part active dans l’éducation et la réinsertion de leur enfant.
Très peu de soutien pour cette réforme de la Justice des Mineurs dû à sa dureté.
En raison de sa dureté, cette réforme de la Justice des Mineurs ne bénéficie que d’un faible soutien populaire.
Tout d’abord, les chiffres nous indiquent que la délinquance juvénile française est en baisse : Les crimes et délits commis par des mineurs est passée de 21 % en 1999 à 12 % en 2023 d’après le Ministère de l’Intérieur.
Ces chiffres sont utilisés par l’opposition qui voit dans ce texte une approche punitive et déshumanisante. Fabien Gay, sénateur communiste, dénonce « une victoire idéologique de l’extrême droite », accusant le texte de légiférer « sous le coup de l’émotion » plutôt que sur la base de faits concrets. Pour lui, la délinquance juvénile est en baisse et le texte pourrait remettre en question des principes fondamentaux du droit pénal des mineurs.
Le collectif « Justice des enfants », qui regroupe des associations et des professionnels de l’enfance, s’oppose fermement à la suppression de l’excuse de minorité systématique. Pour eux, cette mesure est « contraire à la Constitution et aux engagements internationaux de la France ».
Ils soutiennent qu’un adolescent n’a pas les mêmes capacités de discernement qu’un adulte et que l’éducatif devrait primer sur le répressif dans la prise en charge des jeunes délinquants.