La chute de la Syrie de Bachar al-Assad a eu lieu en décembre 2024. En tant qu’européens, nos dirigeants se sont réjouis et la population syrienne également.
Bachar al-Assad représente, en effet, un dictateur brutal qui n’a pas hésité à utiliser des armes chimiques contre sa propre population et à réprimer brutalement les soulèvements de 2011. Être syrien, sous al-Assad, c’est ne pas avoir le droit à la parole.
Un réfugié syrien en Turquie dit à LPM: “Rien ne peut être pire que ce que l’on a vu et vécu sous al-Assad. Même si le nouveau régime était catastrophique, on s’en contenterait, parce qu’avant, c’était forcément pire.“
Pourtant, la violence sous le gouvernement provisoire continue à éclater alors que l’Observatoire syrien des droits de l’homme recense environ 1300 morts en quelques jours, tués par le régime islamique qui est soutenu par la Turquie.
Des massacres à tout va malgré la fuite de Bachar al-Assad vers la Russie.
Récemment, des vidéos diffusées en ligne ont révélé des scènes de civils, principalement issus de la minorité alaouite chrétienne, tués dans les rues. Le vide du pouvoir laissé par la chute du régime d’al-Assad a laissé une place pour le régime islamique, qui essaie de profiter de l’instabilité nationale pour se faufiler dans le gouvernement et prendre le pouvoir.
Les affrontements ont été particulièrement violents dans les provinces côtières de Lattaquié et Tartous, bastions historiques du soutien à Assad. Des témoignages font état de scènes de pillages et de massacres, y compris d’enfants, dans des quartiers à majorité alaouite, tels que Hai Al Kusour à Banias, où des corps jonchent les rues.
Selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH) c’est environ 830 civils qui ont été tués lors de “massacres” ciblant les alaouites sur la côte ouest les 7 et 8 mars. Les affrontements ont également coûté la vie à 231 membres des forces de sécurité et à 250 combattants pro-Assad, portant le bilan total à 1 311 morts.
Le président intérimaire Ahmed al-Chareh n’a pas attendu pour s’exprimer et a promis de tenir pour responsables ceux impliqués dans les violences contre les civils. Dans un discours diffusé à la télévision nationale et sur les réseaux sociaux, Sharaa dit : “Nous affirmons que nous tiendrons pour responsables, fermement et sans indulgence, quiconque est impliqué dans l’effusion de sang de civils ou porte atteinte à notre peuple, qui a outrepassé les pouvoirs de l’État ou exploite l’autorité à ses propres fins.”
Il annonce lors de ce discours la formation d’un “comité indépendant” chargé d’enquêter sur les violations contre les civils et d’identifier les responsables.
Des doutes subsistent quant à la capacité du gouvernement intérimaire à instaurer une véritable justice, compte tenu des antécédents de certains de ses membres. Sharaa lui-même est un ancien membre de l’État islamique, une organisation responsable de nombreux actes de génocide contre des minorités et même des musulmans.
Les réfugiés syriens rentreront-ils à la maison?
La violence persistante a entraîné des déplacements massifs de populations. Plus de 7 600 personnes, majoritairement issues de la minorité alaouite, ont fui vers le nord du Liban, cherchant refuge dans 15 municipalités d’Akkar. Ces déplacés reçoivent une aide humanitaire de la Croix-Rouge libanaise et du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR).
C’est un fort contraste avec l’image de 300,000 syriens qui sont revenus dans leur patrie après la chute du régime d’al-Assad.
Ils risquent fortement de réemigrer puisque 80% des logements en Syrie ont été détruits et, au vu de la violence continue, il n’y aura pas de stabilité politique avant un long moment.
Pour les kurdes, la fin du régime d’al-Assad signifie qu’ils ne sont plus apatrides et seront reconnus en Syrie.
Le gouvernement intérimaire a conclu un accord avec les Forces démocratiques syriennes (FDS), une coalition dominée par les Kurdes.
Cet accord vise à intégrer les FDS dans les institutions étatiques, garantissant ainsi les droits de tous les Syriens à la représentation et à la participation au processus politique, indépendamment de leur origine religieuse ou ethnique. Il reconnaît également la communauté kurde comme partie intégrante de l’État, offrant la citoyenneté à des dizaines de milliers de Kurdes précédemment apatrides sous le régime Assad.
Mazloum Abdi, commandant général des FDS, a salué cet accord comme une “véritable opportunité de construire une nouvelle Syrie qui embrasse toutes ses composantes et assure le bon voisinage“.
Cette inclusion reflète aussi un rejet des politiques d’al-Assad, allié à la Russie mais surtout à la Turquie. La Turquie est effectivement en plein conflit avec les kurdes, qui revendiquent leur indépendance et souveraineté alors que la Turquie nie leur identité et les empêche de parler le kurde ou de l’apprendre dans des écoles indépendantes.