Créatrice du média « Les Pépites Vertes », qui vise à soutenir les jeunes professionnels de la transition écologique, Claire Pétreault, incarne un engagement à la fois profond et lucide. Dans cette interview pour Le Parisien Matin, elle revient sur son parcours et nous parle de son livre « Je bosse pour la planète ! » publié début 2025 aux éditions Eyrolles.
Claire Pétreault pourrait-elle revenir sur ses origines ? Qu’est-ce qui a façonné sa vocation d’agir ?
Je suis née et j’ai grandi à Segré, dans le Maine‑et‑Loire. Très tôt, je me suis sentie concernée par ce qui m’entourait. À 15 ans, j’ai même été vice‑conseillère municipale, ce qui m’a donné cette conviction que l’on peut agir localement dès le plus jeune âge.
J’ai quitté Segré pour Paris, après le bac. Et j’ai intégré Sciences Po, ce qui m’a offert une ouverture incroyable, des idées, des visions… Mais je me suis également confrontée à un sentiment de décalage. Soit passer d’une petite ville, où j’étais très engagée, où « j’étais quelqu’un », à cette immense ville qu’est Paris.
En 2017, j’ai notamment intégré ChangeNOW (un salon dont l’objectif est de présenter des solutions pour la transition écologique et sociale), où j’étais à la communication. J’ai compris que l’endroit où je pouvais être moi-même, c’était l’économie sociale et solidaire.
Claire Pétreault a ensuite lancé Les Pépites Vertes. Quelle a été la motivation ?
J’ai lancé Les Pépites Vertes, pendant le confinement, en tant que média, puis une communauté a grandi. Il fallait, selon moi, créer un espace pour que les jeunes engagés puissent se rencontrer, et comprendre qu’il existait des métiers pour faire bouger les choses. J’ai aussi écrit un livre, lancé une association nommée Le Club des Pépites, toujours avec cette envie de fédérer les jeunes. Elle compte 30 adhérents de moins de 35 ans.
Quels sont les principaux enjeux auxquels il est possible d’être confronté dans ces secteurs ?
Le premier enjeu, c’est l’isolement. La fonction à endosser est parfois difficile à porter en interne, avec des injonctions contradictoires et un modèle économique qui reste encore à inventer. Les jeunes qui sont dans des associations, de grands groupes ou des start-up ont vraiment besoin de connexions entre pairs pour rester motivés. C’est dur de se détacher mentalement. Ce sont des valeurs que l’on porte en dehors du travail, en tant que personne ou encore que consommatrice et consommateur.
Diriger ce média et faire grandir une communauté, cela a dû être exigeant. Claire Pétreault a-t-elle connu des moments difficiles ?
Au bout de quelques années, j’ai vécu un épuisement militant. J’avais été très portée par l’enthousiasme, mais j’endossais aussi beaucoup de choses. Et puis, j’ai perdu le sens que j’avais quand j’ai commencé. L’entrepreneuriat a fait que je me suis sentie surmobilisée. En plus, je voulais changer et sauver le monde, et je me disais que si jamais je m’arrêtais, ça allait être terrible pour la communauté.
Il faut savoir que le burn-out est lié au manque de sens en premier lieu. Par exemple, les artistes peuvent travailler sans compter, mais quand il y a désalignement, le burn-out apparaît. Quand il n’y a plus de sens, le travail devient un sacrifice et le corps crame.
Claire Pétreault est sortie de la gouvernance de l’association. Comment se passent ses journées aujourd’hui ?
En effet, mes journées sont bien remplies ! Je mène de nombreuses conférences, et j’essaie de construire un engagement intergénérationnel. J’ai aussi d’autres activités d’enseignement, notamment à Sciences Po, pour aider les jeunes à porter leurs histoires. Plus on incarne avec sincérité les messages, plus ils ont de chance d’être portés au monde. Transparence et vérité sont les grands principes de la communication selon moi.
Le livre de Claire Pétreault, «Je bosse pour la planète ! », est à la fois pratique et introspectif. Quel est son objectif?
Voyez cela comme un guide pour aller à la rencontre de soi. Avec comme question : « qu’est-ce que j’adore faire ? ». En d’autres termes, cela ressemble à un genre de bilan de compétences, avec une vraie démarche pour se poser sur soi-même. J’aime les choses qui mettent en action. Je mets en avant tout ce que j’ai appris durant ces années de travail et notamment je donne des conseils sur comment se vendre quand on est sur des projets engagés.
J’y parle d’ikigaï (trouver ce qu’on aime, ce en quoi on est bon, ce dont le monde a besoin), des peurs, des différents modèles économiques. Je veux que cet ouvrage aide tout le monde, pas seulement les jeunes dans l’écologie. « Je bosse pour la planète ! » est un livre pour donner du sens à sa vie professionnelle. Par exemple, ma maman enseignante s’est retrouvée dans mes écrits, ça m’a vraiment fait plaisir !
Quelle vision de l’engagement professionnel Claire Pétreault souhaite transmettre à la jeunesse ?
Je crois profondément que l’engagement peut prendre mille formes. Ce n’est pas nécessairement dans une ONG que l’on fait le plus pour la planète… On peut être salarié dans un grand groupe, travailler dans le tertiaire, la comptabilité, l’artisanat… L’important, c’est de trouver sa place, d’aligner ses valeurs et ses compétences.
Le message que je porte tout le temps : il faut toujours rester en mouvement. L’inactivité frise l’anxiété. Dès qu’on agit, que ce soit en association ou ailleurs, dès qu’on est utile, on respire, on retrouve sa place dans le monde. Le marché de l’emploi engagé connaît des hauts et des bas, c’est une réalité économique. Mais ce sont des métiers d’avenir, c’est évident !
Que dirait Claire Pétreault à un jeune qui trouve trop difficile psychologiquement de se lancer dans ce secteur, même si celui-ci l’intéresse ?
Je dirais que nous ne sommes pas nos émotions. Il faut apprendre à faire de nos émotions un levier d’information et de mise en mouvement. Que me disent mes émotions ? À quel besoin sont-elles associées ? Il faut aussi prendre de la distance. L’anxiété, la peur peuvent parfois signifier « mets-toi en mouvement ».


