Le Soudan, pays situé en Afrique de l’Est, est depuis des décennies le théâtre de conflits internes et de violences qui ont façonné son histoire récente. Les guerres soudanaises, en particulier la guerre civile entre le Nord et le Sud et le conflit au Darfour, ont causé d’énormes souffrances humaines et des destructions considérables. Cet article explore les causes profondes de ces conflits, leurs impacts sur la population et le pays, ainsi que les perspectives de paix et de stabilité pour l’avenir.
Le Soudan – Une guerre basée sur les divisions religieuses et exacerbée par la faim.
Le Soudan est un pays extrêmement diversifié sur le plan ethnique et religieux. Le Nord est principalement arabe et musulman, tandis que le Sud est composé de groupes ethniques noirs africains, pratiquant majoritairement le christianisme et les religions traditionnelles. Ces différences ont été exacerbées par des politiques discriminatoires et une gouvernance centralisée qui ont marginalisé les populations du Sud, conduisant à des tensions et à des violences intercommunautaires.
C’est en 1983 que la charia (loi musulmane) est imposée par le président Jaafar Nimeiri, incluant le Sud non-musulman. Cette décision a marqué le début de la deuxième guerre civile soudanaise. La charia incluait des punitions sévères telles que les amputations et les flagellations, et elle a été perçue par les Sudistes comme une tentative d’assimilation et d’oppression culturelle et religieuse.
En 2011, après des décennies de guerre civile, le Sud-Soudan a finalement obtenu son indépendance. La sécession a été largement motivée par les différences religieuses et culturelles, exacerbées par l’imposition de la charia. Cependant, l’indépendance n’a pas mis fin aux conflits, et le Sud-Soudan a rapidement sombré dans une guerre civile interne.
Dans le Nord, l’application de cette loi a favorisé la montée de mouvements islamistes radicaux. Le gouvernement de Omar el-Béchir, arrivé au pouvoir en 1989 par un coup d’État soutenu par des islamistes, a intensifié l’application de la charia et renforcé les liens avec des groupes extrémistes. Cela a isolé le Soudan sur la scène internationale et attiré des sanctions économiques.
Depuis la chute de Omar el-Béchir en 2019, le Soudan est en transition vers un gouvernement civil. En 2020, le gouvernement de transition a annoncé des réformes importantes, y compris la séparation de la religion et de l’État, et la fin de l’application stricte de la charia. Ces réformes visent à apaiser les tensions religieuses et à créer un environnement plus respectueux des droits de l’homme, toutefois on ne peut pas effacer l’impact de la charia sur le Soudan d’un revers de la main.
La guerre civile qui est en cours depuis 2023 trouve en effet sa source dans ces tensions religieuses qui ont donné lieu à une compétition pour les ressources alimentaires. Un cercle vicieux s’installe alors, avec l’insécurité alimentaire qui intensifie les tensions entre les communautés. Lorsque les ressources alimentaires sont limitées, la compétition pour l’accès à la nourriture et aux terres cultivables s’intensifie. Au Soudan, cela se manifeste souvent par des conflits entre éleveurs nomades et agriculteurs sédentaires, chacun cherchant à utiliser les mêmes ressources limitées. Par exemple, dans la région du Darfour, les tensions pour l’accès aux terres arables et aux points d’eau ont alimenté des conflits violents.
Dans certains cas, la faim est utilisée comme une arme de guerre. Les forces en conflit peuvent délibérément détruire les cultures, voler le bétail, ou bloquer l’aide humanitaire pour affaiblir l’ennemi. Cette tactique a été observée dans les conflits au Soudan, où des groupes armés attaquent des villages et détruisent les moyens de subsistance pour contrôler la population et le territoire.
La lutte pour les ressources alimentaires affaiblit la cohésion sociale et favorise l’émergence de groupes armés. Les jeunes, sans emploi et sans perspectives en raison de l’insécurité alimentaire, sont particulièrement vulnérables au recrutement par des milices et des groupes rebelles. Cette militarisation de la jeunesse alimente la violence et prolonge les conflits.
30% de la population Soudanaise souffre de malnutrition aiguë, ce qui constitue une crise humanitaire conséquente.
Quel futur pour le Soudan?
Six mois après le début du conflit entre les Forces d’appui rapide (RSF) et les Forces armées soudanaises (SAF), la situation au Soudan demeure tragique, avec plus de 5 000 morts, 12 000 blessés et 5,7 millions de déplacés. Alors que la violence continue d’ébranler le pays, plusieurs scénarios futurs peuvent être envisagés pour le Soudan.
Si aucune résolution politique n’est trouvée, il est probable que les affrontements entre les RSF et les SAF se poursuivent et s’intensifient. La lutte pour le contrôle des ressources et des territoires stratégiques pourrait entraîner une augmentation des violences, des attaques contre les civils et des déplacements de populations. Les infrastructures civiles, y compris les hôpitaux et les écoles, continueront d’être ciblées, aggravant la crise humanitaire.
L’intensification du conflit pourrait attirer l’attention et l’implication des pays voisins, soit par des interventions directes, soit par le soutien aux différentes factions. Cela pourrait transformer le conflit en une guerre par procuration, avec des puissances régionales utilisant le Soudan comme terrain pour leurs propres rivalités. Cette dynamique compliquerait encore plus la résolution du conflit et augmenterait les souffrances des civils.
En ce moment, l’un des pays voisins qui subit les plus grosses conséquences de la guerre au Soudan est le Tchad. Le Tchad partage une longue frontière avec le Soudan, ce qui en fait une destination accessible pour les réfugiés soudanais. La proximité géographique permet un déplacement relativement rapide, bien que souvent dangereux, vers des zones plus sûres. Depuis le début du conflit en avril 2023, plus de 400 000 Soudanais ont fui vers le Tchad .
Avant cette dernière vague de violence, environ 370 000 réfugiés soudanais étaient déjà présents dans ce pays voisin, principalement à cause du conflit au Darfour depuis 2003.
Plus de 14 camps de réfugiés y sont situés principalement dans l’est du pays, près de la frontière soudanaise .
Les camps sont souvent surpeuplés et manquent de ressources de base. Par exemple, dans le camp de Kounoungou, prévu pour accueillir 20 000 personnes, plus de 30 000 réfugiés y vivent actuellement.
Au vu de la difficulté pour le pays de gérer sa propre situation, la crise humanitaire soudanaise est en train de se déverser dans d’autres pays, ce qui fragilise encore plus le continent africain.
Le futur du Soudan est soumis à l’intervention occidentale, ce qui renforce ce rapport colonisateur que les pays occidentaux ont envers l’Afrique, perpétuant ainsi un rapport de force et pénalisant le continent entier, qui est privé de son indépendance financière et diplomatique.