L’urbanisation en Afrique est marquée par une croissance rapide et une industrialisation inégale, a donné lieu à une prolifération des bidonvilles dans de nombreuses villes du continent.
Historiquement, les villes se développaient autour des centres industriels, attirant des travailleurs des zones rurales vers les opportunités économiques. Cependant, cette dynamique s’est enrayée au fil des décennies, créant des centres urbains qui continuent à croître sans bénéficier d’une industrialisation correspondante.
Résultat : une concentration massive de populations urbaines dans des conditions de pauvreté extrême, exacerbées par l’absence de services de base et de perspectives économiques.
Les bidonvilles africains sont en pleine croissance.
Selon les statistiques des Nations Unies, plus de 1,1 milliard de personnes vivent aujourd’hui dans des bidonvilles dans le monde entier, avec une concentration particulièrement élevée en Afrique subsaharienne.
Environ 53 % de la population urbaine dans cette région vit dans des bidonvilles, une tendance inquiétante qui ne cesse de croître. Ces populations sont souvent entassées dans des logements insalubres, avec un accès limité à l’eau potable, à l’assainissement et à l’électricité.
Les prévisions démographiques indiquent que d’ici à 2070, la population des pays à faible revenu, dont beaucoup se trouvent en Afrique, pourrait atteindre les 750 millions, une augmentation vertigineuse par rapport aux 300 millions actuels.
Or, cette augmentation démographique ne s’accompagne pas d’une croissance économique suffisante, le PIB par habitant n’ayant augmenté que de 0,26 % au cours des trente dernières années. Cette urbanisation galopante a engendré une intensification des inégalités économiques, exacerbant les tensions sociales et politiques dans de nombreuses régions.
Les bidonvilles évoluent avec l’économie informelle et un certain déséspoir social.
Un des aspects caractéristiques de la vie dans les bidonvilles est la prolifération de l’économie informelle. Dans ces quartiers marginalisés, où l’État est souvent absent et les services publics quasi-inexistants, les habitants se tournent vers des formes de micro-entrepreneuriat pour survivre. Environ 75 % des adultes vivant dans les villes des pays à faible revenu travaillent dans l’économie informelle, et plus de la moitié d’entre eux sont autonomes.
Au Kenya, notamment dans le quartier informel de Mukuru à Nairobi, des milliers de micro-entreprises ont vu le jour. Des entreprises de lavage de voitures aux petits étals de vêtements d’occasion, ces initiatives sont souvent gérées par des groupes d’amis ou de membres de la famille élargie. Cependant, les ressources limitées et la surpopulation dans ces zones rendent ces activités précaires. Par exemple, une station de lavage rudimentaire, exploitée par Simon, un jeune de 18 ans, et 15 de ses amis, ne fournissait qu’un seul jour de travail et de revenu par semaine pour chacun d’entre eux.
Face à l’absence de soutien public, les habitants des bidonvilles se tournent vers des réseaux sociaux pour survivre. Les solidarités familiales et amicales jouent un rôle crucial dans la survie économique de ces communautés. Toutefois, dans un environnement aussi précaire, ces liens sociaux sont souvent mis à rude épreuve. Comme l’a souligné Beatrice, une commerçante du bidonville de Mukuru : « Personne ne peut m’aider, chacun se bat pour lui-même. » Ce témoignage reflète une réalité courante dans les bidonvilles, où les filets de sécurité traditionnels s’effritent sous la pression des conditions économiques difficiles.
Les bidonvilles sont également marqués par une absence totale d’infrastructures sanitaires et d’accès aux soins de santé. Les maladies liées à l’eau, comme le choléra, et les infections respiratoires dues à la mauvaise qualité de l’air sont monnaie courante. En outre, l’absence d’accès à l’éducation et à l’emploi formel condamne de nombreux habitants à un cercle vicieux de pauvreté chronique.
En Afrique du Sud, pays souvent cité comme exemple de réussite économique relative sur le continent, les bidonvilles continuent également de croître, reflétant les profondes inégalités héritées de l’ère de l’apartheid. Des villes comme Le Cap et Johannesburg abritent de vastes zones informelles où la majorité des habitants vivent en dessous du seuil de pauvreté.
Dans ces bidonvilles sud-africains, l’économie informelle prend des formes variées, allant des petits services artisanaux à la vente de produits alimentaires. Le quartier informel de Khayelitsha, au Cap, est emblématique de cette situation, avec plus de 400 000 habitants vivant dans des conditions d’extrême pauvreté. Les initiatives économiques sont principalement centrées sur la survie quotidienne, avec très peu de possibilités de mobilité sociale ascendante.
Les efforts pour intégrer ces quartiers dans les plans de développement urbain sont souvent freinés par des intérêts politiques et économiques divergents. Dans de nombreux cas, les autorités locales optent pour des démolitions forcées de bidonvilles, sans offrir d’alternatives viables aux résidents, exacerbant ainsi la précarité.
Des initiatives internationales, telles que celles des Nations Unies et des ONG, visent à améliorer les conditions de vie dans les bidonvilles en fournissant des infrastructures de base comme l’eau potable et les services de santé. Ces efforts sont souvent limités par des ressources financières insuffisantes et des contextes politiques comprenant beaucoup de corruption.