La première visite officielle du président français Emmanuel Macron a eu lieu la semaine dernière. Symbole fort des relations diplomatiques entre les deux pays, les photographies prises en Amazonie immortalisent les enjeux géopolitiques de la région.
Si au Brésil, la forêt amazonienne se porte mieux et la déforestation a sensiblement diminué depuis l’arrivée au pouvoir de Lula, comment vivent les populations indigènes, comment sont-elles confrontées directement au changement climatique et autres enjeux environnementaux ?
Retour sur une visite d’Etat aux enjeux multiples.
Une rencontre au coeur de l’Amazonie
A l’occasion d’une visite d’Etat de trois jours, Emmanuel Macron et son homologue brésilien Lula affichent une entente idyllique partagés à travers différents clichés photographiques largement relayés sur les réseaux sociaux. Derrière le cadre des photos, de réels enjeux géopolitiques persistent notamment la déforestation de l’Amazonie et les populations indigènes qui la peuplent.
Emmanuel Macron s’est d’abord rendu dans le nordeste du pays à Belém, puis le président brésilien Lula l’a rejoint en plein cœur de la forêt amazonienne. Une visite qui s’est par la suite poursuivie à Sao Paulo et Brasilia.
Malgré de nombreux désaccords tant sur la guerre en Ukraine que sur le Mercosur, cette rencontre est l’occasion de renouer des relations diplomatiques de deux pays entachées durant plusieurs années par le mandat du président Jair Bolsonaro (2019-2022).
Une rencontre dominée par des sujets graves où règnent de nombreux désaccords entre les deux homologues notamment sur la guerre en Ukraine et la situation à Gaza.
Le Brésil ne veut pas choisir pour des motifs idéologiques une position sur le conflit israélo-palestinien. Pour la plupart des pays du sud, le conflit est vu comme un conflit colonial qui bafoue le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Enfin, concernant l’accord commercial entre l’Union européenne et le bloc sud-américain du Mercosur, les deux dirigeants sont restés sur leurs positions.
L’Amazonie au coeur de la visite diplomatique : un enjeu capital pour le Brésil
Au cours de cette visite, les enjeux climatiques occupent le devant de la scène. Comment venir en aide à l’Amazonie, le poumon de la planète sans cesse menacé par l’orpaillage, la mondialisation, et abîmé par des années d’exploitation sous le mandat de Bolsonaro. Protection et développement durable de l’Amazonie, coopération dans la fabrication de sous-marins, économie durable : Emmanuel Macron et Lula se sont investis durant trois jours à mettre en avant un partenariat très large.
Ils lancent un programme vert d’investissement pour la forêt amazonienne. Il s’agit d’investir à l’horizon 2028, tant pour la France que pour le Brésil, 1 milliards d’euros à destination de l’Amazonie. Le plan prévoit un plan de gestion durable des forêts ainsi qu’une valorisation économique des territoires.
Emmanuel Macron a assuré que les peuples indigènes seront au cœur de ce projet. lls s’agit de placer les peuples autochtones et les communautés locales au cœur des prises de décision”, selon la feuille de route publiée par la présidence française.
Si Lula a promis de mettre un terme à la déforestation d’ici 2030, on constate une diminution depuis son arrivée au pouvoir de la déforestation. Lors de cette visite, Lula a déclaré qu’il ne s’agit pas de changer l’Amazonie en “sanctuaire de l’humanité” mais de faire en sorte que “les indigènes puissent participer de tout ce qui est tiré de la terre qu’ils habitent”.
Un accord limité pour les indigènes d’Amazonie ?
Symbole de la lutte pour la protection des indigènes, Emmanuel Macron a remis la légion d’honneur au cacique Raoni. La place des indigènes dans la société brésilienne a longtemps été marginalisée et continue de l’être. “Nous avons besoin de plus d’accords, mais surtout qu’ils soient mis en œuvre, et que les pays avec de meilleures conditions aident le Brésil à protéger ses forêts”, a réagi Sônia Gajajara, la ministre des peuples autochtones du Brésil.
Les terres des indigènes sont juridiquement protégées par la constitution de 1988 mais dans les faits, leurs droits ne sont pas respectés et la déforestation illégale bat son plein. Depuis plusieurs années, la situation traversée par les Yanomamis au Brésil ne s’améliore pas.
Lula avait promis de “mettre un terme à l’orpaillage” illégal. Seulement après des opérations d’expulsion en 2023, l’activité minière a repris et l’inaction de l’action publique semble totale. Les milliers d’orpailleurs ont provoqué “ une crise sanitaire dans la réserve indigène” des Yanomamis dans l’Etat du Roraima. Lula avait accusé Bolsonaro d’actions génocidaires et avait déclaré l’urgence sanitaire. Si le gouvernement a tenté de trouver des solutions en débloquant des fonds notamment, elles sont pour l’instant insuffisantes et la situation ne sera toujours pas résolue en 2024.
En attendant, un autre rendez-vous incontournable sur les enjeux climatiques aura lieu en novembre 2025 Belém à l’occasion de la COP 30. Espérons que cette rencontre soit l’occasion de remettre sur la scène internationale la cause des indigènes au Brésil.
Auteur / autrice
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Après une formation en journalisme de défense à la Sorbonne, Cindy Nunes a débuté sa carrière en 2017 comme journaliste-enquêtrice pour Grand Angle Production avant de travailler comme journaliste programmatrice pour différentes structures et médias, de la Chaine Parlementaire au Figaro en passant par Le Point ou Europe 1. Cindy Nunes rejoint l’équipe de RMC en septembre 2023 comme journaliste rédactrice au sein du service web de RMC avant d'offrir sa plume comme rédactrice indépendante à Le Parisien Matin.
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