Il y a quelques jours, Jeffrey Goldberg, rédacteur en chef de The Atlantic, a été ajouté par erreur à un groupe de discussion sur l’application Signal, où des hauts responsables de l’administration Trump débattaient de frappes militaires imminentes au Yémen.
Cet incident peut être perçu comme une conséquence assez amusante de notre dépendance à la technologie moderne en tant qu’outil de communication. Pourtant, ce n’est pas si drôle que ça puisqu’on peut légitimement se demander si la sécurité d’un pays peut être ébranlée si facilement. Pourquoi l’administration américaine parle-t-elle de sujets sensibles sur une discussion de groupe, comme s’il s’agissait d’une discussion au sujet d’un exposé scolaire?
Les Circonstances de la Fuite
Le 11 mars 2025, Jeffrey Goldberg reçoit une invitation inattendue sur Signal, une application réputée pour la sécurisation des échanges. Le groupe, intitulé “Houthi PC small group“, comprenait des figures de proue telles que le vice-président JD Vance et le secrétaire à la Défense Pete Hegseth.
Les discussions portaient sur des détails précis concernant des frappes contre les rebelles houthis au Yémen et détaillait, bien sûr, les types d’armements, les cibles et le calendrier des opérations.
Deux heures après ces échanges, les frappes étaient effectivement lancées,ce qui confirme la véracité des informations partagées.
L’administration Trump remise en question
Cette divulgation accidentelle d’informations de l’intérieur de l’administration déclenche beaucoup de réactions négatives. Les démocrates se disent indignés, et disent que l’incident est une “violation stupéfiante du renseignement militaire“. Le sénateur Chuck Schumer, en particulier, a vraiment condamné cette erreur. Le président Donald Trump, lui, affirme ne pas être au courant de l’article de The Atlantic.
Le secrétaire à la Défense, Pete Hegseth, continue de défendre l’opération militaire, et a tenté de disqualifier Jeffrey Goldberg en le qualifiant de “journaliste discrédité“.
De son côté, le porte-parole du Conseil de sécurité nationale, Brian Hughes, a reconnu lui que ce groupe était bien authentique, mais dit qu’aucune information classifiée n’avait été compromise.
Quand la Technologie pose problème
L’incident montre que l’équipe du conseiller à la sécurité nationale, Mike Waltz, avait mis en place au moins 20 groupes de discussion sur Signal pour coordonner des travaux officiels de l’administration sur des sujets militaires tels que l’Ukraine, la Chine, Gaza et le Moyen-Orient.
Cette utilisation généralisée d’une application non sécurisée pour des discussions de haute importance nous ramène au questionnement quant à la protection des informations sensibles et au respect des lois fédérales sur la conservation des archives.
Les Américains peuvent-ils accepter que le monde politique ait des discussions importantes via des groupes de discussion?
Des experts en sécurité disent que Signal offre un chiffrement de bout en bout mais que son utilisation pour des communications gouvernementales sensibles présente beaucoup de risques. Par exemple, en matière de conformité aux réglementations sur la conservation des enregistrements et de protection contre la surveillance étrangère.
Le sénateur Mark Warner critique fermement la négligence des responsables impliqués, et signale que leur imprudence a mis en danger des vies américaines. Il compare cette situation à des cas où des membres des forces armées ou de la CIA auraient été licenciés pour une gestion aussi négligente d’informations classifiées.
Le candidat proposé par le président Trump pour diriger le Pentagone, le lieutenant-général à la retraite Dan Caine, explique lors de son audition au Sénat ses préoccupations concernant l’utilisation d’applications de messagerie non sécurisées par l’administration pour discuter des opérations militaires. Il met aussi l’accent sur la nécessité d’avoir un effet de surprise lorsqu’il s’agit d’opérations militaires. Ce chat en question est selon lui, une “discussion politique partisane” plutôt qu’une délibération politique sérieuse.