L'émancipation diamantaire réclamée par le Président du Zimbabwe
Le président zimbabwéen Emmerson Mnangagwa a lancé aujourd’hui un appel fort aux pays du G7 pour qu’ils respectent la gestion autonome de l’Afrique de son secteur diamantaire. S’exprimant lors de la 9e réunion de l’Association africaine des producteurs de diamants (ADPA), qui s’est tenue aujourd’hui aux chutes Victoria, il a vivement condamné les pays du G7 pour avoir restreint le commerce des diamants naturels, qualifiant cette mesure d’”inappropriée”.
Dans son discours, Mnangagwa a déclaré : « Les restrictions proposées sur le commerce des diamants naturels imposées par certains acteurs du marché sont inacceptables. » Cette déclaration reflète les préoccupations croissantes au sein de l’Afrique face aux tentatives externes de contrôler ses ressources naturelles vitales, telles que les diamants.
Le président zimbabwéen a également profité de cette tribune pour encourager les dirigeants africains à défendre vigoureusement les intérêts du continent en ce qui concerne le secteur diamantaire. Il a souligné que l’Afrique devrait tirer profit de l’exploitation de ses ressources naturelles et a appelé à une gestion souveraine du secteur.
En insistant sur l’indépendance de l’Afrique, Mnangagwa a plaidé en faveur de la prise de décisions autonomes en matière de politique diamantaire, notamment en ce qui concerne l’équilibre entre la rentabilité économique et la durabilité environnementale. Cette position souligne l’importance d’une approche équilibrée qui garantisse à la fois la prospérité économique et la préservation des précieuses ressources naturelles du continent.
L’Association africaine des producteurs de diamants (ADPA), dont Mnangagwa a pris la parole, joue un rôle crucial dans cette dynamique. Cette organisation intergouvernementale vise à renforcer le niveau d’influence des pays africains producteurs de diamants sur le marché mondial du diamant. Ses efforts visent à consolider la position de l’Afrique en tant que principale actrice sur la scène diamantaire mondiale.
L’appel énergique du président Mnangagwa pour une gestion souveraine du secteur diamantaire africain souligne la nécessité pour le continent de prendre en main son propre destin économique et environnemental. Alors que l’Afrique s’efforce de maximiser les avantages de ses ressources naturelles, une approche collaborative et solidaire entre les nations africaines est essentielle pour garantir un avenir prospère et durable pour le secteur diamantaire africain.
Le G7 - historiquement intrusif quant à la politique diamantaire en Afrique
Jusqu’à présent, l’intervention des pays du G7 dans le commerce des diamants a été significative, marquée par des politiques de restriction et de régulation. Les pays membres du G7 ont souvent imposé des normes et des réglementations strictes concernant le commerce des diamants, notamment en ce qui concerne leur origine et leur traçabilité afin de prévenir le commerce de diamants de conflit. Cependant, ces mesures ont parfois été perçues comme des entraves à l’industrie diamantaire africaine, limitant sa capacité à commercialiser ses ressources naturelles de manière autonome. Les pressions exercées par les pays du G7 ont donc souvent été perçues comme une ingérence dans les affaires internes des pays africains producteurs de diamants, suscitant des réactions mitigées au sein de la communauté internationale.
Un appel puissant suite à des sanctions contre le président zimbabwéen
Il est probable que la demande du président zimbabwéen soit liée au fait qu’il a été sanctionné il y a quatre jours pour contrebande de diamants. Les États-Unis ont sanctionné le président zimbabwéen Emmerson Mnangagwa pour corruption en lien avec la contrebande d’or et de diamants, ainsi que pour des violations des droits de l’homme. Le département du Trésor des États-Unis, par le biais de son Office of Foreign Assets Control (OFAC), a accusé Mnangagwa d’avoir “fourni un bouclier protecteur” aux réseaux de contrebande d’or et de diamants opérant au Zimbabwe.
Il est également accusé d’avoir dirigé des responsables zimbabwéens pour “faciliter la vente d’or et de diamants sur les marchés illicites” et d’avoir “accepté des pots-de-vin en échange de ses services”. Ces nouvelles sanctions ont été émises après la signature par le président américain Joe Biden d’un décret présidentiel qui a mis fin à l’urgence nationale au Zimbabwe et a levé les sanctions sur l’ensemble du pays, afin de ne pas cibler ses citoyens.
Une critique des sanctions pourrait être formulée en soulignant qu’elles pourraient avoir un impact disproportionné sur la population zimbabwéenne déjà éprouvée par des difficultés économiques et politiques.
En effet, bien que ces sanctions visent à cibler spécifiquement les responsables de la corruption et des violations des droits de l’homme, elles pourraient également avoir des répercussions sur l’ensemble du pays, en entravant son développement économique et en affectant les conditions de vie des citoyens ordinaires.
De plus, certaines critiques pourraient remettre en question l’efficacité de ces sanctions dans la promotion de la démocratie et des droits de l’homme, suggérant qu’elles pourraient entraîner des réactions hostiles et une polarisation politique, plutôt que de favoriser le changement positif souhaité. Enfin, il est possible de critiquer le fait que ces sanctions pourraient être perçues comme une ingérence dans les affaires internes d’un État souverain, remettant en question le principe de non-ingérence dans les affaires intérieures des autres pays.
Une demande du président zimbabwéen qui ne passera pas inaperçue à l’étranger
Suite à cet appel en faveur de l’indépendance dans la gestion du secteur diamantaire, il est possible que le président zimbabwéen Emmerson Mnangagwa fasse face à des réactions tant sur le plan national qu’international. Au niveau national, cette déclaration pourrait renforcer son image en tant que leader défendant les intérêts souverains de son pays, lui permettant de consolider sa base de soutien. Cependant, cela pourrait également susciter des critiques de la part de l’opposition et de la société civile, qui pourraient percevoir cette déclaration comme une tentative de détourner l’attention des problèmes internes du pays, notamment la corruption et les violations des droits de l’homme.
Sur la scène internationale, cette déclaration pourrait être perçue comme une tentative de défiance à l’égard des pays du G7 et de leurs politiques de régulation du commerce des diamants. Cela pourrait entraîner une intensification des tensions diplomatiques et potentiellement de nouvelles pressions économiques sur le Zimbabwe, notamment de la part des États-Unis.
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Shantel est journaliste et reporter. Elle est spécialisée dans les questions africaines et l'économie et offre régulièrement son expertise au Matin Parisien.
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