Festival international de film rime avec tapis rouge, célébrités, flashs qui crépitent, robes de créateurs…Comme à Cannes ou à Berlin, le plus ancien festival de ce genre au monde est devenu un rendez-vous européen incontournable du 7ème art.
La Mostra de Venise accueille les plus grandes stars. Angelina Jolie, Georges Clooney, Nicole Kidman ou Isabelle Huppert, Présidente du jury de cette année, se succèdent pour sa 81ème édition. A côté du glamour, il y a aussi des « invités surprises ». Parmi eux, la Commission européenne est présente.
Pour certains, cette institution désincarnée, lointaine, illégitime, nous submerge de normes et de règles. Que fait-elle donc là ? Le Parisien Matin vous le fait découvrir grâce à un entretien anonyme avec une porte-parole de la Commission européenne.
Bruxelles est bien loin de ses « tours d’ivoire » à la Mostra de Venise
Parmi les 83 films projetés dans le cadre de la sélection officielle cette année, 10 productions ont été soutenues par l’Europe. Une création, « La récolte » de la réalisatrice grecque, Athina Rachel Tsangari, est en lice pour la prestigieuse récompense, le Lion d’or. Les autres films sont en compétition dans différentes autres catégories. Les lauréats de cette édition 2024 seront annoncés le 7 septembre prochain.
Les œuvres ont bénéficié d’un soutien de l’Union européenne de plus de 1,7 millions d’euros en tout. Pour ce faire, une des conditions essentielles est que les projets soient coproduits par des équipes internationales provenant de plusieurs pays européens différents.
La Commission européenne ne fait pas que soutenir financièrement le cinéma continental. Elle est aussi présente physiquement à la Mostra de Venise. Ce que l’on sait peu est qu’un festival de film n’est pas que projections, jolies robes, remise de prix et défilés de vedettes. C’est aussi l’occasion de la tenue d’un marché. Des droits sont négociés, des copies de films échangées, des contrats signés… Des rencontres et événements professionnels sont également organisés. C’est dans ce cadre que l’institution bruxelloise est présente.
La commissaire européenne tchèque, Vera Jourova, vice-présidente chargée des valeurs et de la transparence, est à Venise. Son agenda est dense. Après sa rencontre avec le directeur artistique du département cinéma de la biennale, elle participe à une table-ronde sur l’impact social des documentaires. Elle a prononcé l’allocution d’ouverture d’une journée ukrainienne.
Proposé par l’organisateur du marché, ce focus est consacré aux productions filmographiques du pays et propose des espaces d’échanges avec les professionnels présents. La commissaire va également assister à la première du film d’Olha Zhurba, réalisatrice ukrainienne dont la création a bénéficié d’une aide européenne.
L’Union européenne soutient, depuis de nombreuses années, le 7ème art à la Mostra de Venise
Depuis 1991, l’Europe vient en aide aux industries cinématographiques et audiovisuelles par l’intermédiaire dun programme du nom de MEDIA. Trente ans plus tard, ce programme devient une partie ’d’un dispositif plus large intitulé « Europe créative ». Depuis 2021, le mécanisme est globalement doté d’un budget de 2,44 milliards d’Euros et ceci, jusqu’en 2027. Environ 200 millions par an sont alloués au volet MEDIA.
La partie consacrée au soutien à la production cinématographique n’est pas l’essentielle. Priorité est donnée au développement des entreprises audiovisuelles et aux contenus européens au niveau mondial. L’amélioration de la circulation, la promotion et la distribution des œuvres européennes sont aussi des axes forts. Enfin, l’encouragement des talents et le développement des publics, surtout les jeunes, font partie des enjeux européens primordiaux.
Pour illustrer, prenons l’exemple du film « Anatomie d’une chute » de Justine Triet. « La Commission européenne a aidé financièrement ses distributeurs dans 24 pays du continent. Le montant total de la subvention s’élevait à 600 000 euros sur un budget global de production de 6,2 millions d’euros », précise une porte-parole, pour l’industrie digitale, la recherche et l’innovation, de la Commission européenne. Elle ajoute que « cela a contribué au succès européen du film puisqu’il a été vu par plus d’un million de spectateurs en dehors de la France ».
MEDIA concerne bien entendu les professionnels des 27 pays de l’Union européenne mais aussi 8 Etats en voie d’adhésion tels, par exemple, l’Albanie ou l’Ukraine. Il s’élargit enfin à deux pays voisins que sont l’Arménie et la Tunisie.
Les montants des subventions varient en fonction des projets. « Les distributeurs de « Sans filtre » du réalisateur suédois Ruben Ostlund, nommé à l’Oscar du Meilleur film en 2023 et couronné de la Palme d’or à Cannes, ont reçu 1,9 millions d’euros » explicite la porte-parole de l’institution européenne.
Des classiques français tels « La vie d’Adèle », « L’auberge espagnole » ou « Le fabuleux destin d’Amélie Poulain » ont bénéficié du programme. Au niveau européen, on peut citer « Good bye Lenin ! » ou encore « The pianist ».Cette année, MEDIA comptait 5 films en compétition pour la Palme d’or à Cannes.
Pour être complet sur ce programme, il fallait interroger les bénéficiaires. Grâce à Delphine Mougenot, Secrétaire générale de l’Union des Producteurs Francophones de Films, certains professionnels ont témoigné. Ils connaissent tous le dispositif et ont soumis, parfois avec succès, des projets. Ils s’accordent tous sur l’importance de son soutien pour pouvoir produire des œuvres cinématographies.
Un autre point fait l’unanimité, la lourdeur administrative. « Depuis 2017, le montage des dossiers est devenu incroyablement plus compliqué…les documents sont trop lourds à faire et les écrire est terriblement chronophage » témoigne Guillaume Malandrin, producteur pour l’entreprise belge Altitude 100.
MEDIA est un programme parmi des dizaines d’autres dispositifs européens de soutiens à des projets dans une multitude de secteurs différents. La Commission européenne n’est pas que productrice de normes et de règlements. Elle aide concrètement au développement d’initiatives engagées sur son territoire mais aussi bien au-delà.