La Commission européenne a adressé un avertissement officiel à la plateforme chinoise Temu pour ses pratiques commerciales jugées contraires au droit de consommation de l’UE. Temu est accusée d’user de tactiques déloyales qui exploitent les consommateurs européens, dont des fausses promotions, des ventes sous pression, et des informations incomplètes sur le droit de rétractation.
L’enjeu est de taille car il s’agit de préserver l’équité du marché européen et la sécurité des consommateurs, face à une hausse des plateformes asiatiques qui dominent l’e-commerce.
Les lois européennes de protection des consommateurs et comment Temu essaie d’y échapper
L’Union européenne est dotée de lois rigoureuses pour protéger les consommateurs, notamment la Directive sur les pratiques commerciales déloyales (UCPD) qui interdit les pratiques trompeuses, comme les faux rabais ou les incitations à l’achat basées sur de fausses informations. Il y a aussi la Directive sur les droits des consommateurs qui garantit le droit de rétractation dans les 14 jours suivant l’achat ou le Règlement général sur la sécurité des produits (GPSR) qui entrera en vigueur en décembre 2024, oblige les plateformes à désigner un représentant au sein de l’UE pour assurer la conformité aux règles de sécurité.
Ces lois imposent des obligations strictes aux entreprises pour qu’elles fournissent des informations véridiques et que leurs pratiques commerciales ne nuisent pas aux consommateurs. La sécurité des produits est aussi une priorité, et le GPSR permettra aux autorités de retirer tout produit jugé dangereux.
Temu est soupçonnée de recourir à plusieurs techniques d’influence pour pousser les Européens à acheter, sans se conformer aux normes locales. Les autorités de protection des consommateurs de plusieurs pays européens, dont l’Allemagne et la Belgique, ont pointé des infractions telles que le fait d’afficher des réductions inexistantes, pour donner l’impression de faire de bonnes affaires.
Ce n’est pas légal de montrer des promotions inexistantes. Pareillement, les ventes sous pression sont contre-indiquées, c’est-à-dire mettre les consommateurs sous pression avec des offres limitées, incitant à des décisions rapides et souvent irréfléchies.
Conditionner l’accès aux offres par des jeux obligatoires, comme des roues de fortune, sans transparence sur les règles et les récompenses est également une infraction assez claire. Puis, en matière de retour des produits et de remboursement, Temu n’affiche pas les droits de rétractation ou les conditions de retour de manière transparente Les utilisateurs n’ont même pas facilement accès aux coordonnées de la plateforme pour poser des questions ou déposer des plaintes.
Les plateformes chinoises, comme Temu et Shein, dominent le marché de l’e-commerce avec des prix très bas, rendus possibles par des économies d’échelle et des coûts de production réduits. Cependant, leur modèle d’affaires repose souvent sur des pratiques qui contournent les lois européennes. Ces plateformes mettent en avant un consumérisme intensif qui sape les régulations européennes, en dévalorisant les produits locaux et en incitant à des achats impulsifs sans égard pour les droits des consommateurs.
Temu utilise des stratégies de marketing agressif qui dissimulent les informations nécessaires aux clients pour choisir leurs produits en toute connaissance de cause. L’entreprise chinoise parie sur des prix bas pour attirer un grand nombre de consommateurs, mais ce modèle économique rend difficile la conformité aux standards élevés de l’UE.
Plusieurs autorités européennes ont déjà pris des mesures similaires contre d’autres entreprises chinoises, mais Temu représente un cas sévère de la résistance de certaines plateformes asiatiques à se conformer aux lois de l’UE.
En 2021, l’Office polonais de la concurrence a infligé des amendes aux plateformes asiatiques pour des informations trompeuses sur les droits de retour. En 2023, la Hongrie a également ouvert une enquête pour pratiques déloyales contre plusieurs plateformes asiatiques, en réponse à des plaintes de consommateurs concernant la qualité et la sécurité des produits.
Selon une étude de l’UE en 2023, 62 % des consommateurs européens ont déjà été confrontés à des pratiques commerciales trompeuses en ligne, et près de 48 % des acheteurs sur les marketplaces chinoises ont rencontré des problèmes de qualité ou de retour de produits. Ces chiffres soulignent l’ampleur du défi posé par des entreprises comme Temu, et la nécessité d’une action concertée pour protéger les droits des consommateurs en Europe.
Face aux pratiques déloyales de Temu, les réprésentants de l’Union européenne ne se laissent pas faire.
Une déclaration de Věra Jourová, Vice-présidente pour les Valeurs et la Transparence, montre une posture ferme de l’UE dans la régulation du commerce numérique. Elle insiste sur l’« intransigeance » vis-à-vis des normes de protection et sur le fait que les pratiques non conformes de certaines plateformes étrangères, telles que Temu, ne seront pas tolérées.
“Assurer la sécurité des consommateurs dans l’UE est une priorité pour la Commission. Par conséquent, le respect de nos normes de protection des consommateurs par les entreprises commerciales est non négociable. Le dévouement et les efforts coordonnés des autorités nationales jouent un rôle essentiel pour garantir un marché équitable et sécurisé pour tous. Aujourd’hui, nous avons partagé nos préoccupations avec Temu et nous exhortons cette entreprise à aligner rapidement ses pratiques avec les règles de protection des consommateurs de l’UE.“
Věra Jourová, Vice-présidente pour les Valeurs et la Transparence
La Commission européenne, en collaboration avec les autorités nationales, entend protéger les consommateurs et rétablir une transparence souvent mise à mal par des pratiques commerciales trompeuses des entreprises chinoises comme Temu.
Il faut se souvenir que la France avait mis un frein à l’import de fast-fashion qui non seulement contribue à la pollution terrestre de part la consommation massive d’énergie dans l’industrie du textile mais qui transforme également notre planète bleue en poubelle à ciel ouvert.
“Tous les acteurs du marché qui ciblent les consommateurs du marché unique doivent respecter les lois de l’UE en matière de consommation, qu’ils soient établis au sein ou en dehors de l’Union. C’est essentiel pour protéger efficacement les consommateurs et garantir une concurrence équitable. Je félicite les autorités nationales pour leur action coordonnée. Temu doit maintenant prendre les règles de l’UE au sérieux et aligner ses pratiques sur les lois européennes de protection des consommateurs.“
Didier Reynders, Commissaire à la Justice
La priorité est la sécurité et la transparence pour les consommateurs et pour l’égalité des conditions pour les entreprises de l’UE face aux entreprises comme Temu. Cette position vise à préserver la concurrence et à limiter l’influence de pratiques étrangères qui pourraient contourner les normes européennes.
Le pouvoir reste toutefois entre les mains des consommateurs. Après tout, le marché européen est le plus convoité au monde et acheter chinois, c’est laisser les entreprises chinoises prendre des décisions à notre place, telles que ne pas respecter les règles du marché européen.