Ce mercredi 22 Mai, le procureur au procès historique du massacre du 28 septembre 2009 en Guinée a requis la réclusion criminelle à perpétuité pour l’ex-dictateur Moussa Dadis Camara et six autres responsables militaires ou gouvernementaux de l’époque. Plus de 156 personnes ont été tuées, des centaines blessées et au moins 109 femmes violées lors de la répression d’un rassemblement de l’opposition. Quinze ans plus tard, le procès de cet événement dramatique touche à sa fin avec des réquisitions sévères du ministère public.
Le début des réquisitions très attendues en Guinée
Mercredi, le ministère public guinéen a entamé ses poursuites contre l’ex-dictateur Moussa Dadis Camara et dix autres anciens responsables militaires et gouvernementaux. Ce procès, ouvert en septembre 2022, est qualifié d’“historique” par le substitut du procureur Abdoulaye Babadi Camara. L’importance de ce procès réside dans sa capacité à apporter justice aux victimes et à leurs familles, tout en réaffirmant le principe qu’ “qu’aucun Guinéen n’est supérieur à un autre dans ce pays”.
Les représentants du ministère public ont rappelé les nombreux crimes reprochés aux accusés : assassinats, actes de torture, coups et blessures volontaires, séquestrations, incendies volontaires et pillages. Ils ont souligné la nécessité de requalifier les faits en crimes contre l’humanité, une demande essentielle pour refléter l’ampleur des atrocités commises ce jour-là.
La Guinée subit un rappel poignant des événements tragiques
Les faits du 28 septembre 2009 restent gravés dans les mémoires. Des leaders de l’opposition et des milliers de sympathisants s’étaient rassemblés dans un stade de Conakry dans une atmosphère joyeuse, faite de chants, de danses et de prières. Mais la situation a rapidement dégénéré lorsque la garde présidentielle, les gendarmes, les policiers et des miliciens en civil ont fait irruption en tirant sur la foule.
Le substitut du procureur a décrit avec émotion les violences subies par les manifestants. “C’est à ce moment-là que la garde présidentielle, les gendarmes, les policiers et les miliciens en civil ont fait irruption en tirant dans tous les sens”, a-t-il affirmé. “Dans le même stade, des femmes ont été violées, d’autres ont subi des bastonnades sévères (…), et des personnes ont été dépossédées de leurs biens.”.
Ces exactions brutales se sont ensuite propagées autour du stade et ont continué les jours suivants. La promptitude de la Croix-Rouge a permis de sauver certains citoyens, mais le bilan reste lourd. Les chiffres officiels font état de 156 personnes tuées par balle, couteau, machette ou baïonnette, des centaines de blessés et au moins 109 femmes violées. Cependant, les chiffres réels sont probablement plus élevés, ce qui met en lumière l’ampleur de la tragédie.
Les accusations contre Dadis Camara et ses complices
Le procureur Alghassimou Diallo a demandé la réclusion criminelle à perpétuité pour Moussa Dadis Camara et six autres responsables. Il a insisté pour que cette peine soit assortie d’une période de sûreté de 30 ans. Les accusés incluent d’anciens hauts responsables comme Moussa Tiegboro Camara, l’ancien patron de l’anti-drogue, Abdoulaye Cherif Diaby, ex-ministre de la santé, et Claude Pivi, l’ancien ministre de la sécurité présidentielle actuellement en cavale.
Le procureur a accusé Dadis de n’avoir pas pris de mesures pour stopper les actions des hommes dont il était responsable. “Il n’a rien fait pour que ce meeting ne soit pas réprimé. Au contraire, il l’a planifié”, a déclaré Elhadj Sidiki Camara, un autre représentant du ministère public. Cette accusation repose sur des preuves montrant que Dadis aurait prémédité la répression de la manifestation, aggravant ainsi sa culpabilité.
Réquisitions Inattendues a l’encontre de Toumba
Le parquet a surpris en demandant une peine de 14 ans d’emprisonnement contre deux accusés, et 15 ans pour trois autres. Le procureur a refusé les circonstances atténuantes, soulignant la gravité des crimes commis et l’impact durable sur les victimes et leurs familles.
Parmi eux, Ibrahima Camara, alias Kalonzo, Paul Mansa Guilavogui, deux militaires de moindre importance, et Aboubakar Diakité, surnommé Toumba. Ce-dernier est devenu populaire sur les réseaux sociaux pour sa répartie et sa décision de révéler “sa part de vérité” durant le procès. Beaucoup appellent à son acquittement en ligne.
Cependant, les avocats des parties civiles ont insisté sur le rôle de Toumba dans le massacre du stade, où plus d’une centaine de personnes ont péri. Selon eux, Toumba était bel et bien présent sur les lieux pour prendre part à la répression.
Le parquet a montré plus de clémence envers Cécé Raphaël Haba et Mamadou Aliou Keïta, réclamant 14 ans de détention pour chacun. Mamadou Aliou Keïta est pourtant accusé de viol par une victime qui l’a formellement identifié. Ces réquisitions sont désormais entre les mains du tribunal, qui décidera du verdict final.
Une journée fatidique et ses répercussions internationales
Le massacre du 28 septembre 2009 a suscité une vive indignation nationale et internationale. Les événements de cette journée ont été marqués par une brutalité effrénée et une répression aveugle. Le représentant du ministère public a qualifié cette journée de “fatidique” et a évoqué une “indignation nationale et internationale”.
L’ampleur des violences et la réponse internationale ont poussé à la création d’une commission d’enquête internationale mandatée par l’ONU. Le rapport de cette-dernière a mis en évidence l’horreur des événements et a recommandé des actions judiciaires contre les responsables. Ce procès est donc crucial non seulement pour la Guinée, mais aussi pour la communauté internationale, qui suit de près les développements et attend que justice soit rendue.
Alors que le ministère public présente ses réquisitions, l’attention se porte sur le tribunal, chargé de décider des peines pour les accusés. Les avocats de la défense s’exprimeront également avant le verdict final. La réclusion criminelle à perpétuité, assortie d’une période de sûreté de 30 ans, est requise pour Moussa Dadis Camara et plusieurs autres responsables. Ces peines sévères reflètent la gravité des crimes commis et l’impact durable sur les victimes. La Guinée et le monde attendent avec impatience le verdict final, espérant que ce procès historique apportera enfin justice et réconciliation.