Isabel dos Santos, autrefois considérée comme la femme la plus riche d’Afrique, est désormais une figure emblématique de la corruption et de l’évasion des autorités. Fille aînée de l’ancien président angolais José Eduardo dos Santos, elle est sous le coup de multiples enquêtes internationales et de mandats d’arrêt, mais continue de mener une vie fastueuse, notamment à Dubaï, un refuge stratégique.
Une Chute grave pour Isabel dos Santos
Isabel dos Santos a construit une immense fortune durant les 38 années de règne de son père, profitant de sa position privilégiée pour obtenir des contrats lucratifs dans les secteurs pétrolier, bancaire, et des télécommunications. Son ascension fulgurante est devenue emblématique de la corruption qui gangrène les institutions africaines, en particulier en Angola, où des millions de dollars ont été siphonnés du trésor public pour enrichir une élite restreinte.
En 2019, l’enquête « Luanda Leaks » menée par l’International Consortium of Investigative Journalists (ICIJ) a mis au jour des transactions douteuses, dévoilant comment Isabel dos Santos et ses associés ont détourné des centaines de millions de dollars via un réseau complexe de sociétés offshore. En réponse à ces révélations, des tribunaux en Angola, au Portugal, et dans d’autres pays ont gelé ses actifs, cherchant à récupérer les fonds mal acquis.
Isabel dos Santos a réussi à échapper aux poursuites grâce à son exil à Dubaï. La ville émiratie, réputée pour son opacité financière et son laxisme en matière de réglementation, est devenue un sanctuaire pour des personnalités controversées comme dos Santos. Elle continue de vivre dans le luxe, documentant sa vie sur les réseaux sociaux, et se vantant de ses propriétés immobilières, dont plusieurs sont situées dans des complexes résidentiels exclusifs sur le front de mer.
Des documents récemment divulgués révèlent que dos Santos et sa mère, Tatiana Kukanova, possèdent plusieurs propriétés à Dubaï, acquises pour des sommes bien inférieures à leur valeur actuelle. Par exemple, un appartement acheté en 2009 pour environ 163 000 dollars est aujourd’hui estimé à plus de 570 000 dollars. Ces transactions soulèvent des questions sur l’origine des fonds utilisés et sur la manière dont ces biens ont échappé au gel des actifs ordonné par les tribunaux.
Les Répercussions pour Isabel dos Santos
En 2024, Isabel dos Santos a été inculpée de 12 crimes en Angola, notamment pour détournement de fonds et blanchiment d’argent. En outre, un tribunal de Londres a ordonné le gel de jusqu’à 733 millions de dollars de ses actifs, intensifiant la pression sur l’ancienne magnat des affaires.
L’emplacement stratégique de ses biens à Dubaï, ainsi que l’absence de transparence dans le système financier émirati, compliquent la récupération de ces fonds. Cette situation illustre les défis auxquels sont confrontées les autorités internationales dans leur lutte contre la criminalité financière transfrontalière, en particulier lorsque les individus concernés trouvent refuge dans des juridictions aux réglementations plus souples.
L’absence d’un traité d’extradition entre les Émirats arabes unis et plusieurs pays, dont l’Angola, a permis à beaucoup d’échapper à la justice. La loi fédérale n° 20 de 2018 sur la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, bien qu’ambitieuse, est souvent contournée.
Par exemple, l’article 6 de cette loi oblige les autorités à geler les biens illicites, mais son application reste inégale. Entre 2013 et 2021, les Émirats arabes unis ont enregistré un afflux de capitaux privés de plus de 140 milliards de dollars, dont une part importante proviendrait de fortunes opaques.
Le pays a un taux d’imposition effectif de 0% pour les revenus individuels, ce qui en fait un paradis pour les riches évadés fiscaux. Les experts estiment qu’environ 5% des biens immobiliers de Dubaï sont détenus par des personnes ou des entités liées à des affaires criminelles ou de corruption, soulignant les failles persistantes dans le système de régulation.
Le cas d’Isabel dos Santos est également symptomatique des luttes de pouvoir au sein de l’élite angolaise. Depuis l’arrivée au pouvoir de João Lourenço, le successeur de José Eduardo dos Santos, une campagne agressive de lutte contre la corruption a été lancée, visant principalement les proches de l’ancien président. Isabel dos Santos, autrefois intouchable, est devenue la cible principale de cette croisade, sa chute marquant une rupture nette avec l’ère de son père.
Elle continue de clamer son innocence, qualifiant les accusations portées contre elle de persécution politique, une stratégie de défense courante parmi les élites déchues. Toutefois, ses détracteurs estiment que ces allégations ne sont qu’une tentative désespérée de détourner l’attention de ses propres malversations.
Alors que les enquêtes se poursuivent et que les appels à l’extradition se multiplient, Isabel dos Santos demeure une figure centrale de l’un des plus grands scandales financiers de l’histoire africaine.