Depuis l’invasion russe de l’Ukraine en 2022, le soutien américain à Kyiv a été un pilier central de la stratégie occidentale visant à contenir l’expansionnisme russe.
Avec environ 63 milliards d’euros en aide militaire, l’Ukraine a reçu des États-Unis un appui monétaire incontournable. Les autres pays européens n’ayant pas d’industrie militaire ou de fonds qui puissent rivaliser avec ceux des États-Unis, il était donc naturel que le président ukrainien Volodymyr Zelensky tente d’obtenir de l’aide de l’Oncle Sam
L’arrivée de Donald Trump à la Maison-Blanche en janvier 2025 a radicalement changé la dynamique entre Washington et Kyiv. Loin du soutien inconditionnel apporté par l’administration Biden, l’attitude de Trump envers l’Ukraine oscille entre indifférence et confrontation, une évolution qui met Kyiv dans une position diplomatique et stratégique précaire.
Hier, une rencontre à la Maison-Blanche américaine a montré que les relations entre l’Ukraine et les États-Unis étaient en péril. Donald Trump insiste que Zelensky doit signer un accord avec Poutine pour stopper cette guerre et l’a traité d'”ingrat” au cours d’un échange houleux qui s’est soldé par un départ précipité de la Maison-Blanche du président ukrainien. d’un échange houleux qui s’est soldé par un départ précipité de la Maison-Blanche du président ukrainien.
Une rencontre désastreuse à la Maison-Blanche
La rencontre du 28 février 2025 entre le président ukrainien Volodymyr Zelensky et le président américain Donald Trump a illustré la détérioration des liens entre les deux pays.
Alors que Zelensky espérait obtenir des garanties stratégiques et un accord sur l’exploitation des ressources minières ukrainiennes, il a été confronté à une administration beaucoup plus exigeante et réticente à offrir un soutien sans contrepartie. La rencontre a rapidement dégénéré en une série d’échanges houleux entre Trump, son vice-président J.D. Vance et Zelensky, reflétant des visions totalement opposées de la situation.
Trump a adopté une posture transactionnelle, exigeant des concessions majeures de Kyiv en échange d’une aide militaire. Le président américain a notamment reproché à Zelensky son manque de gratitude envers les États-Unis et son refus d’envisager des négociations avec la Russie. « Vous devez être plus reconnaissant, car sans nous, vous n’avez aucune carte en main », a lancé Trump. Cette rhétorique a choqué de nombreux Ukrainiens, qui voyaient dans l’administration américaine un soutien inconditionnel.
L’épineuse question du soutien militaire
L’un des points centraux de la discussion était l’approvisionnement militaire de l’Ukraine. Sous Biden, Washington avait fourni des dizaines de milliards de dollars d’aide militaire, incluant des systèmes de défense aérienne avancés, des chars et des munitions. Mais Trump et Vance ont pointé du doigt un problème critique : l’Ukraine manque de soldats. « Peu importe combien d’équipements nous envoyons, si vous n’avez pas d’hommes pour les utiliser, cela ne sert à rien », a décrété Vance, qui souhaitait insister sur les difficultés de recrutement de Kyiv et la dépendance croissante aux conscriptions forcées.
L’absence de garanties américaines a laissé Zelensky dans une position difficile. L’Europe, affaiblie économiquement et stratégiquement, n’est pas en mesure de compenser le retrait progressif du soutien américain. La rencontre s’est achevée sur un échec cuisant : l’accord minier attendu n’a pas été signé, et Zelensky a été prié de quitter la Maison-Blanche plus tôt que prévu.
L’Ukraine sera-t-elle conduite à accepter un cessez-le-feu qui n’offre d’avantages qu’aux russes?
Pour Zelensky, la voie de la diplomatie ne peut plus être choisie: Avec l’occupation de grands pans de l’Ukraine depuis 2014 par la Russie, l’Ukraine a tout de même essayé de signer un cessez-le-feu qui aurait immédiatement été violé par Vladimir Poutine.
Il a donc posé une question rhétorique à J.D Vance pendant cette discussion, lui demandant de quelle diplomatie parlait-il.
« Je parle du genre de diplomatie qui va mettre fin à la destruction de votre pays. Monsieur le Président, avec tout le respect que je vous dois, je pense qu’il est irrespectueux de votre part de venir dans le Bureau ovale pour essayer de plaider cette affaire devant les médias américains. En ce moment, vous vous promenez et forcez les conscrits à aller au front parce que vous avez des problèmes de main-d’œuvre. Vous devriez remercier le président d’avoir essayé de mettre fin à ce conflit. » a-t-il rétorqué
En effet, les Etats-Unis cherchent à mettre fin à cette guerre qui dure depuis presque trois ans en exigeant que l’Ukraine accepte les termes russes.
Une alternative pour l’Ukraine existe toutefois
Pour l’Ukraine, l’enjeu n’est pas seulement national. Zelensky a tenté de prévenir Donald Trump que l’expansionnisme russe affecterait d’autres territoires, voire même les États-Unis. S’en est suivi une réaction très sèche de la part de Donald Trump:
Zelensky : « Tout d’abord, pendant la guerre, tout le monde a des problèmes, même vous. Mais vous avez un bel océan qui vous sépare et vous ne le ressentez pas maintenant. Mais vous le ressentirez dans le futur. Dieu vous en préserve – »
Trump : « Vous ne le savez pas. Vous ne le savez pas. Ne nous dites pas ce que nous allons ressentir. Nous essayons de résoudre un problème. Ne nous dites pas ce que nous allons ressentir.»
Zelensky : « Je ne vous le dis pas. Je réponds à vos questions. »
Trump : « Parce que vous n’êtes pas en position de nous dicter cela. »
Vance : « C’est exactement ce que vous faites. »
Trump : « Vous n’êtes pas en position de nous dicter ce que nous allons ressentir. Nous allons nous sentir très bien. »
Zelensky : « Vous vous sentirez influencés. »
Trump : « Nous allons nous sentir très bien et très forts. »
Zelensky : « Je vous le dis. Vous vous sentirez influencés. »
Trump : « Vous n’êtes pas, en ce moment, dans une très bonne position. Vous vous êtes laissé mettre dans une très mauvaise position – »
Cet échange a montré que les États-Unis ne sont plus dans l’optique de soutenir l’Ukraine et que Trump voit en l’Amérique une nation inarrêtable, qui ne peut pas être menacé par la Russie comme à l’époque de la Guerre Froide.
Pour l’Ukraine, ce ton irrespectueux du président Donald Trump devrait les mettre en garde: Il est temps de se rapprocher des voisins européens.
Heureusement, face à la désintégration du soutien américain, l’Europe a tenté de rassurer Kyiv. Le Premier ministre britannique Keir Starmer, la Présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, et le Président français Emmanuel Macron ont exprimé leur solidarité envers l’Ukraine, réaffirmant leur opposition à toute paix imposée par Moscou. Bien que les engagements concrets restent limités, il y a toujours la possibilité d’une réindustrialisation de ces pays, qui bénéficieraient énormément de cela d’un point de vue économique. Réduire la dépendance européenne permettrait une réelle souveraineté politique du vieux continent.
Si l’Union européenne a annoncé une augmentation de l’aide financière et militaire, les ressources disponibles restent largement inférieures à celles des États-Unis.
Pour l’instant, 45 milliards d’euros ont été envoyés pour soutenir les efforts militaires ukrainiens par les membres de l’Union européenne. Ce chiffre, bien qu’inférieur n’est pas négligeable.
L’Italie, par la voix de Giorgia Meloni, a proposé un sommet entre les leaders européens et américains pour discuter de l’avenir du soutien à Kyiv. La capacité de l’Europe à influencer la politique de Trump reste limitée, et de nombreuses capitales européennes craignent un accord entre Washington et Moscou qui sacrifierait une partie du territoire ukrainien.
Alors que Kyiv se retrouve isolée, la Russie pourrait tenter de profiter de cette fragilité pour intensifier ses offensives. La question centrale demeure : Zelensky parviendra-t-il à réinventer la diplomatie ukrainienne face à une Amérique de plus en plus distante ?
Si l’Ukraine espère encore des éclaircissements sur la politique américaine, une chose est sûre : la confiance mutuelle entre les deux nations est fortement ébranlée, et l’avenir du soutien occidental à Kyiv n’a jamais été aussi incertain.
Le président Zelensky a toutefois posté un message sur X (Twitter) pour remercier les États-Unis pour leur aide pendant ces dernières années : “Nous sommes très reconnaissants envers les États-Unis pour tout leur soutien. Je suis reconnaissant au président Trump, au Congrès pour leur soutien bipartite et au peuple américain. Les Ukrainiens ont toujours apprécié ce soutien, surtout pendant ces trois années d’invasion à grande échelle.” affirmait-il il y a 6 heures.