Vladimir Poutine est en train de ralentir les négotiations d’un cessez-le-feu avec l’Ukraine alors que Zelensky s’engage à entamer des discussions samedi. Est-ce un aveu de faiblesse de la part de l’Ukraine dans cette guerre sans fin?
L’Ukraine voit qu’il est urgent de ralentir la spirale meurtrière, d’organiser de nouveaux échanges de prisonniers et de rapatrier les enfants déplacés. Zelensky l’a dit avec gravité dans son allocution quotidienne : « La dynamique des négociations doit s’améliorer. Il faut tout faire pour obtenir un cessez-le-feu. »
Le Kremlin, par la voix de son porte-parole Dmitry Peskov, a répondu qu’il était prêt à avancer « rapidement » vers un accord, mais maintient que ses « objectifs » doivent être atteints.
Derrière ces mots, la Russie veut imposer un changement de régime à Kyiv, retirer ses capacités de défense et remettre en question la politique d’élargissement de l’OTAN. Ce n’est donc pas un appel à la paix tel que l’entend l’Ukraine, mais un rappel des conditions imposées depuis le début.
Un nouvel assaut de drones dans cette guerre sans fin
Alors que les deux camps parlent de paix, la guerre elle-même se poursuit sans relâche. La Russie a lancé cette semaine sa plus vaste attaque de drones depuis le début du conflit : 728 drones et 13 missiles ont frappé principalement la ville de Loutsk, au nord-ouest du pays.
CNN rapporte aue l’attaque a été si intense que la Pologne voisine a dû faire décoller des avions militaires pour sécuriser son espace aérien.
Cette salve est survenue seulement quelques heures après que Donald Trump a annoncé la reprise des livraisons d’armes américaines à l’Ukraine.
À Washington, Trump a exprimé sa frustration face au refus de Vladimir Poutine de conclure un accord. Il a assuré Kyiv de son soutien et promis davantage d’armements.
Une guerre qui n’avance pas du tout
Ces frappes spectaculaires font la une des journaux, mais elles cachent le fait que la ligne de front évolue à peine. Les morts se comptent par millions depuis le début de l’invasion, mais le territoire gagné reste dérisoire. Pourquoi ?
La réponse est à chercher dans la façon même dont se mène ce conflit : un retour aux sièges longs, combiné à une nouveauté meurtrière; l’usage massif de drones bon marché.
Tranchées, drones et nouveaux champs de bataille
L’Ukraine est un pays vaste et plat. Faute de montagnes et de forêts denses, les soldats creusent d’immenses tranchées pour se protéger. Comme lors de la Première Guerre mondiale, la boue et la peur y sont omniprésentes. À l’époque, on avait trouvé une solution : les tanks. Mais aujourd’hui, les drones changent la donne.
On imagine souvent les drones comme ces gros appareils américains Predator pilotés à distance, coûtant des millions et tirant des missiles avant de rentrer à la base.
Sur le sol ukrainien, c’est tout autre chose : de petits drones à usage unique, parfois bricolés dans des garages, sont envoyés pour s’écraser sur des cibles précises ou lâcher une grenade sur un groupe d’hommes terrés dans une tranchée.
Ces vidéos où l’on voit un drone descendre lentement pour larguer un explosif sont diffusées partout sur internet. Elles fascinent, même si elles montrent des morts en direct. C’est un reflet sombre de la curiosité morbide.
Les chars devenus hérissons
Ces petits drones ont mis hors d’usage une grande partie des blindés ukrainiens et russes. Pour tenter d’y survivre, les tanks sont recouverts de grilles métalliques et d’armatures qui les font ressembler à des hérissons ambulants, bien loin de l’image d’engins de guerre puissants et effrayants.
Des offensives coûteuses pour des gains minuscules
Tout cela explique pourquoi, après des offensives sanglantes de plusieurs mois, l’armée russe s’est contentée de conquérir une zone équivalente à la superficie du Luxembourg. Les pertes humaines, elles, sont colossales. Vu de l’extérieur, ce conflit paraît « peu intéressant ».
Lorsqu’on compare à la guerre Israël-Iran où chaque journée apporte un changement majeur, l’Ukraine s’enlise, jour après jour, dans un affrontement qui semble sans fin.
Les drones ne tiennent pas un territoire
Un autre point explique cette lenteur : les drones peuvent détruire et tuer, mais ils ne peuvent pas occuper un village ou contrôler une route. Pour cela, il faut des hommes au sol. Et ceux-ci sont devenus paradoxalement plus vulnérables et plus « remplaçables » qu’avant.
L’arrivée massive d’hommes en âge de se battre va constituer des troupes pour de futurs conflits.
Une idée cynique, déjà mise en échec par l’histoire : durant la montée de l’État islamique, plus de musulmans britanniques avaient rejoint Daech que l’armée britannique elle-même.
Une attaque qui a surpris la Russie
Il y a peu, l’Ukraine a réussi un coup spectaculaire. Elle a envoyé des drones camouflés dans des camions jusqu’à des bases aériennes russes supposées être à l’abri. L’attaque a marqué les esprits par son audace, et les images ont tourné en boucle en ligne. Mais depuis, la guerre a repris son rythme lent et sanglant.
Vers des frappes de 2.000 drones par nuit
Les experts allemands et ukrainiens craignent une nouvelle escalade.
La Russie produit aujourd’hui environ 170 drones Shahed par jour et souhaite atteindre 190 d’ici fin 2025.
À ce rythme, elle serait en mesure de lancer 2.000 drones en une seule nuit dès novembre prochain. Elle n’utiliserait pas cette puissance chaque soir, mais pourrait organiser des frappes massives suivies de nuits plus calmes, comme elle le fait actuellement.
Le général Christian Freuding, du ministère allemand de la Défense, a prévenu : il faut trouver des solutions moins coûteuses pour contrer ces drones, car utiliser des missiles Patriot qui valent plusieurs millions contre des appareils fabriqués pour quelques milliers est une stratégie perdue d’avance dans cette guerre.


