L’Allemagne, le Royaume-Uni et la France ont adressé cette semaine un message ferme à l’Iran : si aucun accord n’est trouvé d’ici la fin août sur son programme nucléaire, toutes les sanctions internationales levées en 2015 seront rétablies.
Dans une lettre envoyée mardi au secrétaire général de l’ONU, António Guterres, et aux membres du Conseil de sécurité, les chefs de la diplomatie des trois pays ont rappelé qu’ils avaient déjà prévenu Téhéran. Sans avancée diplomatique ou prolongation des discussions avant la date butoir, le mécanisme prévu pour restaurer les embargos et restrictions sera déclenché dès l’automne.
Jean-Noël Barrot, ministre français des Affaires étrangères, l’a affirmé sur X : « L’Iran ne doit pas accéder à l’arme nucléaire ». Il a prévenu que si la République islamique persistait à ignorer ses engagements, Paris, Berlin et Londres rétabliraient les embargos mondiaux sur les armes, les équipements nucléaires, ainsi que les limitations bancaires imposées il y a une décennie.
“L’Iran doit se souvenir des accords de 2015”
Le trio européen – souvent désigné sous le nom E3 – avait participé, aux côtés de la Chine, de la Russie et des États-Unis, aux négociations qui avaient abouti à l’accord nucléaire de Vienne en 2015.
Ce texte fixait un cadre strict aux activités nucléaires iraniennes en échange d’une levée progressive des sanctions internationales.
Cet accord s’est effondré en 2018, lorsque Washington, sous la présidence de Donald Trump, s’est retiré unilatéralement du pacte. Dans les mois qui ont suivi, Téhéran s’est affranchi de plus en plus ouvertement de ses engagements, et a relancé ses activités d’enrichissement d’uranium à des niveaux jamais atteints depuis la signature de l’accord.
Un programme nucléaire qui ne respecte rien
Les pays occidentaux tentent de relancer un cadre de négociation même s’ils soupçonnent l’Iran de vouloir franchir le seuil technologique permettant la fabrication d’une arme nucléaire. Les autorités iraniennes, elles, nient et disent que leur programme reste civil.
Dans leur lettre à l’ONU, les ministres Johann Wadephul (Allemagne), Jean-Noël Barrot (France) et David Lammy (Royaume-Uni) détaillent une série d’engagements pris en 2015 que l’Iran aurait abandonnés. Parmi eux, l’accumulation d’uranium enrichi à un volume plus de quarante fois supérieur à la limite fixée par le texte initial.
L’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) confirme que l’Iran est aujourd’hui le seul pays au monde, ne possédant pas officiellement l’arme nucléaire, à enrichir de l’uranium à un niveau de 60 %, loin au-dessus du seuil de 3,67 % fixé à Vienne. Plus de soixante rapports publiés depuis 2019 soulignent cette dérive, qui suscite une inquiétude croissante dans les capitales européennes.
Les négociations : mortes et enterrées vives
La fin août s’annonce comme un moment décisif. Les discussions, déjà fragilisées, ont subi un nouveau coup d’arrêt après les frappes israéliennes et américaines du mois de juin. Ce conflit éclair de douze jours a non seulement ralenti les opérations iraniennes, mais aussi gelé les pourparlers entre Téhéran et Washington, ainsi qu’avec le E3.
L’Iran a limité encore davantage sa coopération avec l’AIEA, ce qui a bien compliqué les inspections sur ses sites sensibles.
Le 25 juillet, une rencontre a eu lieu à Istanbul entre les représentants européens et iraniens. Aucun résultat concret n’en est sorti. Quelques jours plus tôt, le ministre iranien des Affaires étrangères, Abbas Araghchi, avait annoncé qu’un haut responsable de l’AIEA se rendrait à Téhéran pour discuter d’un nouveau protocole d’inspections. Mais sur la question des sanctions, Téhéran reste inflexible, affirmant que les Européens n’ont pas la légitimité juridique pour actionner le mécanisme de rétablissement.
L’ultime proposition européenne ignorée
Lors des discussions en Turquie, les Européens avaient proposé de repousser la date limite de fin août si l’Iran acceptait de reprendre les pourparlers avec les États-Unis et de rétablir une coopération plus complète avec l’AIEA. Cette ouverture est restée lettre morte.
À présent, Berlin, Londres et Paris affirment qu’ils disposent d’une base juridique solide pour rétablir les sanctions, et qu’ils n’hésiteront pas à le faire si aucune évolution n’intervient dans les prochaines semaines.
Le bras de fer semble donc se durcir, laissant planer l’ombre d’un automne diplomatique particulièrement tendu entre l’Europe et Téhéran.


