Pour la première fois depuis la chute de Bachar al-Assad, l’État islamique a attaqué les nouvelles forces syriennes. C’était il y a deux jours : une mine télécommandée a explosé au passage d’un véhicule militaire dans le sud du pays et a tué un civil et blessé trois soldats. Le groupe jihadiste, en déclin apparent depuis plusieurs années, semble vouloir rappeler qu’il n’a pas disparu.
Une attaque de l’État islamique dans la province de Sweida
Le mercredi 28 mai 2025, un engin explosif placé au bord d’une route dans la province méridionale de Sweida a visé une patrouille de la 70ᵉ division de l’armée syrienne. L’explosion a causé la mort d’un homme non armé, qui accompagnait les militaires. Trois soldats ont été transportés à l’hôpital, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH).
Dès le lendemain, le groupe État islamique a revendiqué l’opération. Il s’agit de sa première attaque publique contre les troupes du nouveau pouvoir syrien, installé après la chute d’Assad en décembre dernier.
Le dispositif, activé à distance, laisse penser que l’opération a été préparée avec soin. La cible n’était pas choisie au hasard : la 70ᵉ division assure la sécurité d’une zone stratégique, à la frontière entre territoires druzes, plaines agricoles et désert syrien.
Bien que l’État islamique ait perdu son territoire depuis 2019, il conserve des capacités d’action. Ses combattants se déplacent à travers les zones désertiques, évitent les affrontements frontaux et s’appuient sur des réseaux clandestins.
Depuis le début du mois, les autorités syriennes ont annoncé plusieurs arrestations de membres présumés de l’État islamiqu. À Damas, une cellule armée aurait été démantelée avant qu’elle ne passe à l’action. À Alep, une opération des forces de sécurité a tué trois combattants jihadistes. Un officier syrien y a perdu la vie.
Dans le nord-est du pays, les Forces démocratiques syriennes (FDS), dominées par les Kurdes, font face à des attaques régulières. Le groupe jihadiste y cible principalement les prisons et les postes militaires. Les FDS, appuyées par les États-Unis, gardent des milliers de prisonniers liés à l’EI, ainsi que leurs familles, regroupées dans des camps sous surveillance.
Un nouveau pouvoir qui se heurte à une ancienne menace
Depuis la chute de Bachar al-Assad, Ahmed al-Chareh occupe la présidence par intérim. Sa nomination, soutenue par plusieurs pays arabes, n’a pas mis fin aux violences. Le régime qu’il dirige reste fragile, malgré le soutien de factions armées issues de l’ancien gouvernement, et d’alliés régionaux comme la Russie et l’Iran.
Lors d’un sommet à Riyad, le président américain Donald Trump a rencontré Ahmed al-Chareh. Il l’a exhorté à coopérer avec Washington pour empêcher toute résurgence de l’EI. Le message est clair : les États-Unis veulent éviter que la Syrie devienne, à nouveau, un terrain favorable aux ambitions jihadistes.
Le 19 mai, un groupe de coordination a été mis en place à Damas. Il regroupe des officiers de Syrie, de Turquie et de Jordanie, chargés d’échanger des informations sur les mouvements de l’EI. Ankara a confirmé l’envoi de personnels militaires sur place, sans préciser leur nombre ni leur grade.
Le rôle des Kurdes reste au centre des discussions. La Turquie, qui considère les YPG comme une menace, souhaite leur intégration dans l’armée syrienne. Cette proposition a été évoquée lors d’un entretien entre Recep Tayyip Erdogan et Ahmed al-Chareh. Pour Ankara, un commandement unifié permettrait de réduire l’autonomie des forces kurdes tout en consolidant la lutte contre l’État islamiqu.
De leur côté, les FDS refusent de remettre leurs prisonniers à un pouvoir qu’ils jugent peu fiable. Les tensions persistent, bien que les deux camps s’accordent sur un objectif commun : contenir les groupes jihadistes et éviter une nouvelle guerre ouverte.