L’ambassadeur de France au Niger, Sylvain Itte, est rentré à Paris mercredi après plusieurs semaines de tensions avec le régime post-coup d’État en cours dans le pays d’Afrique de l’Ouest, qui avait exigé son expulsion.
Le Ministre des Affaires étrangères français, Catherine Colonna, a rencontré Sylvain Itte pour le remercier, ainsi que son équipe, “pour son travail au service de notre pays dans des conditions difficiles”, a déclaré le ministère dans un communiqué écrit à l’AFP.
Le retour de l’ambassadeur intervient deux mois après un coup d’État au Niger qui a renversé son président pro-Paris et a entraîné un refroidissement des relations entre la France et son ancienne colonie, avec les nouveaux dirigeants nigériens exigeant son départ.
Itte a quitté Niamey avec six collègues “vers 4h00” (0300 GMT), avait précédemment déclaré une source diplomatique à l’AFP.
Dimanche dernier, le Président français Emmanuel Macron avait annoncé dans une interview télévisée que l’ambassadeur quitterait le Niger “dans les heures à venir”.
Les dirigeants militaires du Niger, qui ont renversé le président démocratiquement élu Mohamed Bazoum le 26 juillet, ont salué l’annonce.
Né dans la capitale malienne Bamako en 1959, Itte occupait le poste d’ambassadeur au Niger depuis un an. Sa carrière diplomatique s’étend sur 35 ans, au cours desquels il a été précédemment ambassadeur en Uruguay et en Angola.
– ‘Retour à l’ordre constitutionnel’ –
La junte avait demandé à Itte de quitter le pays après avoir renversé Bazoum et lui avoir retiré son immunité diplomatique et son visa. Cependant, un ultimatum de 48 heures pour son départ, lancé en août, est passé sans qu’il ne quitte le pays, car le gouvernement français avait refusé de se conformer ou de reconnaître le régime militaire comme légitime. Paris avait déclaré que seul le gouvernement destitué de Bazoum pouvait ordonner le départ de l’ambassadeur.
Le bureau de Macron a réitéré mercredi le soutien de la France au président destitué. Il avait déclaré à Hassoumi Massaoudou, ministre des Affaires étrangères du gouvernement renversé, que la France continuerait à travailler “pour un retour à l’ordre constitutionnel au Niger”, a annoncé le Palais de l’Élysée.
Macron a également annoncé dans son interview télévisée de dimanche que les troupes françaises se retireraient du Niger “dans les mois et les semaines à venir” avec un retrait complet “d’ici la fin de l’année”, une autre demande du régime nigérien.
Le président français, qui avait cherché à faire du Niger un allié spécial, a déclaré que la coopération militaire était “terminée”. La France maintient environ 1 500 soldats dans son ancienne colonie d’Afrique de l’Ouest dans le cadre d’un déploiement anti-jihadiste au Sahel.
Le coup d’État contre Bazoum était le troisième putsch de ce type dans la région en autant d’années, suivant des actions similaires dans les anciennes colonies françaises Mali et Burkina Faso en 2021 et 2022, respectivement. Les précédents coups avaient également entraîné le retrait des troupes françaises.
– Le leader destitué ‘retenu en otage’ –
Macron a déclaré dimanche que les autorités nigériennes post-coup “ne voulaient plus lutter contre le terrorisme”. Il a également réaffirmé la position de la France selon laquelle Bazoum était retenu “en otage” et restait “l’unique autorité légitime” dans le pays. Le président élu est resté confiné au palais présidentiel avec sa femme et son fils.
La junte avait salué l’annonce de Macron dimanche dernier comme “une nouvelle étape vers la souveraineté”, mais a déclaré que le calendrier du retrait militaire “devait être établi dans un cadre négocié et par accord mutuel”.
Le Niger, comme le Burkina Faso et le Mali, est la cible d’attaques jihadistes depuis plusieurs années. Ces dernières semaines, des dizaines de milliers de personnes ont participé à des manifestations à Niamey pour demander le retrait des troupes françaises du pays.
Les États-Unis, qui ont environ 1 100 militaires au Niger, ont déclaré qu’ils “évalueraient” leurs prochaines étapes dans la crise à la suite de l’annonce de la France. Le secrétaire à la Défense des États-Unis, Lloyd Austin, lors d’une visite en Angola mercredi, a déclaré que Washington continuerait à soutenir les militaires “dirigés par des civils” en Afrique. “Lorsque les généraux renversent la volonté du peuple et placent leurs propres ambitions au-dessus de l’État de droit, la sécurité en pâtit”, a-t-il déclaré, dénonçant les “autocrates” qui “sabotent les élections libres et équitables”.