Le Festival du Livre de Paris 2024 a eu lieu du 12 au 14 avril dernier au Grand Palais éphémère.
Cette année, le Québec et sa littérature étaient à l’honneur et les autrices et auteurs de la province canadienne ont été plus d’une quarantaine à faire le voyage outre-Atlantique.
Le Festival du Livre de Paris 2024 crée de la joie chez les auteurs et lecteurs
« C’est une grande joie de voir des collègues à Paris, c’est exaltant! » s’exclame l’autrice et professeure de création littéraire et de théorie psychanalytique à l’Université McGill, Laurance Ouellet Tremblay.
La venue d’une délégation québécoise au Festival du Livre de Paris ne s’était pas faite depuis 1999. Et l’accueil réservé à ce nouveau groupe de littéraires ne fut pas timide. Plus de 103 000 festivalières et festivaliers ont répondu présents lors des trois jours du Festival du Livre de Paris.
Et le mélange d’auteurs et autrices québécois conviés était à l’image de la littérature québécoise: « autant des auteurs établis qu’une nouvelle génération », explique Charlotte Biron, professeure de littérature québécoise à l’Université du Québec à Montréal (UQAM) et autrice.
Ainsi, le public français a pu rencontrer Kim Thúy, dont le roman Ru fut récemment adapté au grand écran, l’auteur et journaliste innu Michel Jean, Patrick Sénécal, l’auteur de plusieurs romans dont Les 7 jours du Talion, et également Chrystine Brouillet, Gabrielle Boulianne-Tremblay, Heather O’Neill et Michel Rabagliati.
Pour Mme Ouellet Tremblay, il était grand temps que la littérature québécoise soit mise de l’avant par la France, mais « c’est vraiment sans amertume, la littérature québécoise a beaucoup à apporter à cette scène.»
Ainsi, le public a pu assister à « une rencontre entre le féminisme au Québec et le féminisme en France, avec une invitée comme Martine Delvaux », explique Mme Biron. “C’est intéressant de nourrir ces liens.»
Et entre la France et le Québec, au niveau de la littérature, il est loin le temps des caricatures et des préjugés basés sur des modes de vie, des cultures ou des accents qui diffèrent.
« Il y a toujours le risque de simplifier et de revenir à une sorte de caricature du bucheron québécois, mais je pense que ce n’est pas ça du tout qui est en train de se passer », pense Mme Biron.
Des liens forts entre la littérature de la France et du Québec visibles au Festival du Livre de Paris 2024
« Je remarque que de plus en plus d’écrivains québécois vivent en France ou y séjournent régulièrement, développant des relations étroites avec le milieu littéraire hexagonal, d’égal à égal pour ainsi dire », explique Michel Biron, professeur de littérature à l’Université McGill.
Récemment le prestigieux prix Médisis 2023 fut remis au Montréalais Kevin Lambert pour son roman Que notre joie demeure, paru au Nouvel Attila. Il succède seulement à Marie-Claire Blais pour Une saison sans la vie d’Emmanuel, publié chez Grasset, en 1966.
Et il en a d’autres, la poétesse Hélène Dorion est la première Québécoise inscrite au programme du bac. Denise Desautels est entrée dans la collection « Poésie » de Gallimard et l’écrivaine québécoise Dominique Fortier a remporté le prix Renaudot de l’essai. « Sans parler de Dany Laferrière, admis à l’Académie française », termine M. Biron.
« Avant il fallait passer par Paris, c’était la consécration », explique Charlotte Biron. « Maintenant c’est plus un dialogue: des littéraires qui parlent à d’autres littéraires et qui s’enrichissent mutuellement. »
« Je crois que c’est pour le mieux », estime Mme Ouellett Tremblay. « Ce sont deux deux traditions différentes, mais nous partageons la même langue, donc pourquoi ne pas s’entendre? »
Le Festival du Livre de Paris laisse place à une littérature québécoise en pleine effervescence
L’autrice québécoise et professeure Mme Ouellett Tremblay, originaire de Chicoutimi qui vit à Montréal depuis 2007, décrit la littérature québécoise comme étant « en pleine adolescence ».
« C’est difficile d’avoir un pas de recul, par le passé on a pu dire qu’elle était un peu figée, sans aventures, avec des personnages ratés… mais elle est beaucoup plus que ça », explique-t-elle.
Aujourd’hui, de nouvelles préoccupations et rêves habitent la littérature québécoise, qui « dépassent la question identitaire, ce qui cerne sans doute ce qu’a été la littérature québécoise pendant longtemps: la forêt, la langue, le territoire », explique Charlotte Biron.
Pour Michel Biron, la littérature québécoise de nos jours est « une mosaïque de styles et de thèmes ». Plusieurs littératures façonnent l’univers québécois: « la littérature autochtone, la littérature des femmes, la littérature queer, la littérature de terrain, la littérature jeunesse, la littérature anglo-québécoise…», énumère M. Biron.
« Ce n’est pas étonnant cette effervescence, on s’est doté des moyens nécessaires », explique Mme Ouellett Tremblay.
Au commencement des années 2000, plusieurs nouvelles maisons d’édition ont vu le jour, et d’autres déjà existantes, comme Mémoire d’Encrier et Remue-Ménage ont gagné en importance.
Et depuis quelques années, la Belle Province a vu une prolifération des évènements littéraires en tout genre: des festivals, des salons de livres, des lectures publiques de poésie, des ateliers d’écritures et des conférences.
Le Festival du Livre de Paris en a peut-être inspiré d’autres, les autrices et auteurs québécois seront également conviés à la Foire du livre de Göteborg, en Suède, en 2026.
Auteur / autrice
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Charlotte Glorieux est une journaliste société pour Le Parisien Matin. Charlotte vient de terminer une maîtrise en journalisme avec le programme Erasmus Mundus décembre 2023. Passionnée par la littérature, l'environnement, les droits des migrants et des peuples autochtones, Charlotte s'intéresse à des sujets d'actualité essentiels. Canadienne basée à Montréal, elle a également vécu plusieurs années en Europe, ce qui lui confère une perspective internationale dans son travail.
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