Stanislas Hutin n’a jamais voulu être soldat. Mais lorsqu’il a été appelé par l’armée française pour combattre lors de la guerre d’indépendance algérienne en 1955, il n’avait pas le choix. Pendant deux ans, M. Hutin a été témoin de la mort, de la torture et de la violence alors que l’empire français se battait pour conserver le pouvoir sur un territoire qui était, à l’époque, colonisé. Il a tenu un journal pour faire face à l’horreur.
“La colonisation est devenue une image sombre de mon pays”, déclare M. Hutin, qui a aujourd’hui 92 ans et vit à Paris. “Quand je suis arrivé en Algérie, j’ai vu des injustices flagrantes. Je ne pouvais pas le tolérer.”
En 2002, M. Hutin a publié son journal de guerre pour partager ses expériences d’une bataille à laquelle il n’a jamais cru. Mais il voulait aller plus loin. En 2014, il a rejoint une organisation locale à but non lucratif qui aidait d’anciens soldats français à faire don de leurs pensions militaires à des projets d’aide en Algérie.
Recherche de réparations : dilemme de la France
POURQUOI NOUS AVONS ÉCRIT CET ARTICLE Ce qui s’est passé en Algérie était en net contraste avec les principes fondateurs de la France : liberté, fraternité et égalité. Ce paradoxe, disent les historiens, est au cœur des difficultés de la France à composer avec son passé colonial.
Depuis lors, il verse son allocation annuelle de 800 € (environ 844 $) à 4ACG (Anciens Appelés en Algérie et leurs Amis Contre la Guerre), qui contribue à des programmes d’éducation pour les jeunes et les femmes dans l’ancienne colonie française. Le groupe, qui compte désormais environ 400 membres, a collecté plus d’un million d’euros (environ 1,06 million de dollars) depuis 2004.
“Je n’ai même pas hésité une seconde. C’est la chose juste à faire”, déclare M. Hutin. “Nous devons reconnaître les injustices et les réparer.”
La France, comme de nombreux pays dont la Grande-Bretagne et les Pays-Bas, a du mal à accepter son passé colonial. Contrairement à d’autres pays européens, comme l’Allemagne, qui ont accepté une forme de réparations, la France a refusé de présenter des excuses, notamment en 2021.
Leçons de l’histoire : réparer un héritage d’injustice
Entre-temps, des voix conservatrices ont détourné le débat sur les réparations dans ce que les critiques considèrent comme une tentative de blanchir le colonialisme. Parallèlement, les générations de Franco-Algériens cherchent à concilier leur place dans la société française, dans le cadre d’un dialogue national continu sur l’immigration et l’identité.
Un héritage colonial Bien que l’empire français soit présent en Afrique depuis le XVIIe siècle, son influence coloniale mondiale a véritablement débuté avec la conquête de l’Algérie en 1830. Même si la France a continué à exercer son influence en Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale, sa relation avec l’Algérie a toujours été unique. L’Algérie était la seule colonie française considérée comme faisant partie de la France et divisée en trois provinces.
Cependant, les Algériens vivant sous le joug colonial français avaient un statut inférieur et étaient qualifiés d’indigènes. La plupart étaient empêchés d’aller à l’école, et lorsque l’Algérie a obtenu son indépendance en 1962, plus de 85 % de la population était analphabète. Avant la guerre d’Algérie – qui a fait entre 400 000 et 1,5 million de morts parmi les Algériens – les historiens estiment qu’un tiers de la population avait déjà été décimé, en raison des épidémies et des invasions.
“Il y avait déjà un très haut niveau de traumatisme au sein de la population algérienne, même avant la guerre d’Algérie”, déclare M. M’hamed Oualdi, professeur d’histoire de l’Afrique du Nord moderne et contemporaine à Sciences Po-Paris.
Pour en savoir plus sur cette histoire, consultez The Christian Science Monitor.