Depuis des décennies, les trous noirs fascinent les scientifiques et le grand public par leur mystère et leur complexité. Ces objets cosmiques extrêmes, où la gravité est si intense qu’elle empêche même la lumière de s’échapper, sont des laboratoires naturels pour tester les lois de la physique dans leurs limites les plus extrêmes.
En 2019, une avancée révolutionnaire a été réalisée lorsque le télescope Event Horizon (EHT) a capturé la toute première image d’un trou noir, situé au cœur de la galaxie M87, ce qui marque une étape majeure dans notre compréhension de ces phénomènes.
Le dernier trou noir
La galaxie M87, située dans la constellation de la Vierge, abrite un trou noir supermassif, dont la masse est estimée à 6,5 milliards de fois celle du Soleil. Cette image, dévoilée en avril 2019, a permis d’observer pour la première fois l'”ombre” d’un trou noir, entourée d’un anneau lumineux formé par du gaz chauffé à des millions de degrés en orbite avant d’être absorbé. Cet exploit a nécessité une collaboration internationale et une technologie innovante pour combiner les données de télescopes répartis sur toute la Terre.
Les trous noirs, bien qu’étant par définition invisibles, se manifestent souvent par des phénomènes extrêmement lumineux. Dans le cas de M87, des jets de particules s’étendent sur des milliers d’années-lumière à partir de ses pôles. Ces jets, produits par des champs magnétiques intenses et des interactions dans le disque d’accrétion, projettent des particules à des vitesses proches de celle de la lumière.
En 2023, une équipe internationale de chercheurs a observé un phénomène encore plus spectaculaire : une éruption gamma d’une intensité inégalée depuis plus d’une décennie. Ces éruptions, mesurées en téraélectronvolts (TeV), sont des manifestations d’une énergie extrême, des millions de fois plus puissante que la lumière visible. Cette éruption, qui a duré trois jours, proviendrait d’une région située à moins de trois jours-lumière du trou noir, correspondant à environ 15 milliards de kilomètres.
Ce qu’on ne sait pas sur les trous noirs
Les mécanismes exacts par lesquels ces particules atteignent de telles énergies restent un sujet de débat parmi les scientifiques. Lorsque la matière tombe vers un trou noir, une partie de son énergie gravitationnelle est convertie en énergie cinétique et thermique dans le disque d’accrétion. Cependant, certains électrons et positrons sont expulsés par les pôles, formant des jets alimentés par les champs magnétiques.
Ces jets produisent des rayons gamma à haute énergie, détectés par des instruments comme VERITAS (Very Energetic Radiation Imaging Telescope Array System). Grâce à une analyse spectrale détaillée, les chercheurs peuvent décomposer la lumière en différentes longueurs d’onde et comprendre les processus physiques à l’origine de ces émissions. Par exemple, l’interaction entre les particules du jet et le champ magnétique pourrait expliquer ces accélérations.
Pour mieux étudier ces phénomènes, des dizaines d’observatoires terrestres et spatiaux collaborent, combinant des données de rayons X, d’ondes radio et de rayons gamma. Des télescopes comme le Fermi-LAT, le Hubble Space Telescope et le NuSTAR contribuent à fournir une vue d’ensemble des processus qui se déroulent autour des trous noirs.
Cette approche a permis de découvrir que l’éruption gamma observée dans M87 est liée à des variations de la position du jet et de l’horizon des événements, suggérant une interaction complexe entre ces structures.
Les trous noirs, et les éruptions de rayons gamma associées, jouent un rôle clé dans l’évolution des galaxies. Les jets relativistes influencent la formation des étoiles en balayant ou en enrichissant le gaz interstellaire. Les rayons cosmiques générés par ces phénomènes pourraient avoir un impact direct sur la Terre, bien que leurs origines exactes soient encore débattues.