Le président sénégalais Bassirou Diomaye Faye, élu en mars dernier, a été désigné facilitateur de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) pour les discussions avec l’Alliance des États du Sahel (AES). Cette nomination résulte du dernier sommet le 7 juillet à Abuja. Diomaye se retrouve au cœur d’une mission diplomatique délicate visant à réconcilier les positions des trois pays de l’AES, le Burkina Faso, le Mali et le Niger, qui ont exprimé leur intention de quitter l’organisation régionale depuis janvier.
La nomination stratégique de Bassirou Diomaye Faye pour apaiser les tensions
Lors du 65ème sommet de la CEDEAO, les dirigeants ouest-africains ont confié à Bassirou Diomaye Faye la mission délicate de négocier avec les dirigeants de l’AES. Cette décision fait suite à la création de la Confédération des États du Sahel par le Mali, le Burkina Faso et le Niger, une initiative qui a exacerbé les tensions avec la CEDEAO.
Le président de la Commission de la CEDEAO, Omar Alieu Touray, a exprimé ses préoccupations quant aux conséquences de cette scission : “Le retrait des trois pays portera un coup dur à la coopération en matière de sécurité, notamment en termes de partage de renseignement et de participation à la lutte contre le terrorisme dans la sous-région”. La nomination de Diomaye intervient ainsi comme une tentative de rétablir le dialogue et de prévenir une désintégration de l’espace communautaire.
Une mission de médiation décisive
Le président Bassirou Diomaye Faye s’engage à faciliter le dialogue entre la CEDEAO et l’AES, soulignant l’importance de la diplomatie sénégalaise. Il a stipulé que “le Sénégal est un grand pays, pas par sa superficie, mais sur le plan des hommes qui ont incarné ses institutions”. Sa mission, en collaboration avec le président togolais Faure Gnassingbé, vise à éviter le départ effectif des trois pays, prévu pour le 28 janvier 2025 selon le traité de l’organisation.
Lors de son discours à Abuja, il a déclaré : “Entre-temps, nous ne pouvons pas rester les bras croisés. Notre responsabilité, c’est de travailler à rapprocher les positions, à les réconcilier”. Il souhaite qu’avant la fin du préavis, des échanges constructifs facilitent la réconciliation des positions et le renforcement de l’organisation pour qu’elle soit mieux équipée à affronter les défis communs.
Les enjeux d’un retrait de l’AES de la CEDEAO pour Bassirou Diomaye Faye
Le départ des trois pays de l’AES serait une “grande blessure au panafricanisme” selon Diomaye, et pourrait avoir des répercussions non négligeables à l’échelle de la région. Omar Alieu Touray, président de la Commission de la CEDEAO, a souligné que “le retrait des trois pays portera un coup dur à la coopération en matière de sécurité, notamment en terme de partage de renseignement et de participation à la lutte contre le terrorisme”. En outre, la désintégration de la CEDEAO pourrait entraîner un isolement diplomatique et politique pour ces pays, les privant du soutien du bloc pour des candidatures à des postes internationaux.
Économiquement, le retrait de ces pays pourrait suspendre des projets et programmes de la CEDEAO dans ces États, d’une valeur estimée à plus de 500 millions de dollars américains. Cette situation pourrait également affecter la libre circulation des personnes et des biens, ainsi que les conditions de voyage et d’immigration.
Diomaye, un médiateur crédible
Le choix de Bassirou Diomaye Faye comme facilitateur repose sur sa crédibilité et son expérience diplomatique. Il a déjà rencontré les dirigeants militaires du Mali, du Burkina Faso et du Niger, et a montré un optimisme quant à la réussite des négociations. Sa position équilibrée et son appel à une réforme de la CEDEAO en font un candidat idéal pour cette mission délicate.
Gnimdewa Atakpama, Délégué aux affaires intérieures du Parti des Togolais, estime que “la réussite de la mission du président Faye dépendra de la coordination et de la coopération entre les différents dirigeants de la CEDEAO, ainsi que de la volonté des trois pays de revenir dans l’organisation régionale”. Pour Oumar BA, enseignant-chercheur au Centre d’Études Diplomatiques et Stratégiques (CEDS) de Paris, il est crucial que la CEDEAO montre des signes de flexibilité et de compréhension pour faciliter le retour des trois pays.
Les tenants et aboutissants de la mission de facilitateur
La mission du président sénégalais s’annonce complexe mais revêt un aspect primordial. Les sanctions économiques imposées par la CEDEAO aux pays de l’AES ont été partiellement levées pour faciliter le dialogue, mais les dirigeants de ces pays ont maintenu leur position de retrait. La CEDEAO espère que Diomaye pourra utiliser son influence pour convaincre les dirigeants de l’AES des avantages d’une réintégration.
Les défis sont nombreux : rétablir la confiance, garantir la sécurité régionale et promouvoir le développement économique. Selon Babacar Ndiaye, directeur de la recherche du think tank WATHI, “la réussite de cette mission dépendra de la capacité de Faye à naviguer entre les intérêts divergents et à proposer des solutions innovantes”.
La mission de Bassirou Diomaye Faye s’annonce certes complexe, mais elle est essentielle pour préserver l’intégrité et la cohésion de la CEDEAO. En travaillant à rapprocher les positions et en renforçant la coopération régionale, le président sénégalais joue un rôle clé dans la stabilité et la sécurité de l’Afrique de l’Ouest. Comme il l’a explicité, “notre responsabilité, c’est de travailler à réconcilier les positions et à renforcer l’organisation afin qu’elle puisse mieux répondre aux défis communs”. Avec la bonne volonté des parties impliquées, cette mission de médiation a toutes les chances de réussir et de contribuer à un avenir plus harmonieux pour la région.