Dans un coup de maître inattendu, Donald Trump s’est récemment lancé dans la classe ouvrière américaine en travaillant dans un McDonald’s à Feasterville, en Pennsylvanie.
Alors que l’élection présidentielle de 2024 approche à grands pas, Trump a adopté cette stratégie inhabituelle mais incroyablement efficace pour à la fois se rendre plus accessible et tacler sa rivale politique, la vice-présidente Kamala Harris.
Cette apparition dans un fast-food n’est pas qu’un simple coup de communication — c’est une manœuvre stratégique destinée à renforcer son lien avec les électeurs de la classe ouvrière qui lui sont restés fidèles tout au long de sa carrière politique.
Travailler chez McDonald’s quand on est riche, c’est se connecter avec la classe ouvrière
L’un des piliers des campagnes présidentielles de Trump a toujours été sa capacité à résonner avec les Américains ordinaires, en particulier la classe ouvrière. Sa dernière apparition dans un restaurant McDonald’s, où il a enfilé un tablier et travaillé aux friteuses, vise à souligner cette connexion de manière symbolique et directe. Lors de cette visite très médiatisée, Trump a manipulé les friteuses, distribué de la nourriture au drive et plaisanté avec les clients en disant que les repas étaient « pour lui ».
Pour beaucoup de ses partisans, cet acte sert de rappel que Trump, malgré son statut de milliardaire, prétend comprendre les difficultés des Américains ordinaires. Le fast-food, et McDonald’s en particulier, est un thème récurrent de sa campagne, un symbole iconique de la vie américaine, accessible à tous. En s’associant à McDonald’s, Trump réaffirme son engagement à être un leader pour les électeurs de la classe ouvrière qui l’ont propulsé à la victoire en 2016 et qui restent une part cruciale de sa base en 2024. C’est un geste de gratitude en quelque sorte.
Qui aurait pensé que travailler chez McDonalds nuirait à Kamala Harris ?
Bien que la visite de McDonald’s soit un coup de campagne en soi, elle sert aussi de pique calculée contre Kamala Harris. Lors de sa précédente campagne présidentielle, Harris avait mis en avant ses origines modestes, en évoquant un job d’été qu’elle aurait occupé chez McDonald’s alors qu’elle étudiait à l’Université Howard. Trump, cependant, n’a pas tardé à remettre en question l’authenticité de cette affirmation, l’accusant d’avoir inventé cette histoire.
En « travaillant » lui-même chez McDonald’s, Trump ne se contente pas de saper le récit d’Harris, il ramène également l’attention sur sa propre campagne, où il se positionne comme quelqu’un qui comprend vraiment les réalités du monde du travail américain. Lors de sa visite, Trump a taclé Harris en déclarant : « Je suis en compétition avec quelqu’un qui a dit avoir travaillé chez McDonald’s, mais il s’avère que c’est une histoire totalement bidon ».
Il a également affirmé que Kamala s’était plainte de travailler chez McDonald’s et de la difficulté de ce travail avant de se tourner vers le directeur de McDonald’s de Pennsylvanie et de lui demander : « Depuis combien d’années travaillez-vous ici ? ».
En posant cette question, Donald Trump sous-entend que soit Kamala Harris est paresseuse, soit qu’elle a oublié les personnes qui occupent des emplois qu’elle affirme trouver difficiles et qu’elle refuse de les comprendre.
Que l’expérience d’Harris chez McDonald’s soit vraie ou non, la tactique de Trump fait basculer la conversation en sa faveur, en suggérant que son adversaire est déconnectée des électeurs de la classe ouvrière qu’elle prétend représenter.
Avec ce nouveau coup de théâtre, Trump réussit à rappeler à ses électeurs qu’il est prêt à se mettre à leur place, prêt à faire preuve d’empathie (Chose que lui a beaucoup reproché un électorat féminin démocrate qui n’était pas impressionné par sa réputation de misogyne).
De surcroit, si certains Américains reprochaient à Trump d’être incapable de bien se comporter en public ou d’être méprisant face au “petit peuple”, les vidéos mettant Trump en scène montrent un homme affable, travailleur, qu n’a pas peur du contact humain.
C’était réellement un coup de maître.
Le symbolisme du fast-food dans la campagne de Trump
L’affection de Trump pour le fast-food est bien connue du grand public. Il a souvent évoqué sa préférence pour McDonald’s, citant la cohérence et la propreté des établissements comme raisons de sa fidélité.
En 2016, Trump avait notamment organisé une réception à la Maison Blanche pour l’équipe de football de l’Université de Clemson, où il avait servi un buffet de fast-food incluant des hamburgers et des frites de McDonald’s et d’autres chaînes. Cette association constante avec la restauration rapide est devenue un symbole du message populiste de sa campagne — rapide, abordable et, surtout, américain.
Bien que certains puissent rejeter ce coup chez McDonald’s comme un simple coup médiatique, il y a plus en jeu ici. Le fast-food représente le mode de vie de la classe moyenne et ouvrière que Trump affirme défendre, et McDonald’s, en particulier, est un symbole de la culture américaine. En travaillant chez McDonald’s, Trump exploite ce symbolisme culturel, se connectant aux électeurs de manière viscérale, au-delà de la politique. Il s’agit de se rendre accessible, même si les circonstances réelles de son passage chez McDonald’s étaient soigneusement mises en scène.
Les critiques de Trump ont rapidement souligné que son apparition chez McDonald’s à Feasterville n’avait rien d’authentique. Le restaurant avait été fermé pour l’événement, avec des clients présélectionnés qui se sont rendus au drive pour être servis par l’ancien président. Certains détracteurs de Trump ont qualifié cela de spectacle mis en scène, soulignant que ce n’était pas une journée de travail ordinaire au restaurant.
Cependant, d’un point de vue de la campagne, l’optique de l’événement pourrait s’avérer plus importante que la réalité. L’apparition de Trump chez McDonald’s s’inscrit dans sa stratégie politique plus large de brouiller la frontière entre le spectacle et la gouvernance. Que l’événement ait été authentique ou non, les images de Trump en tablier, servant des frites, resteront gravées dans l’esprit de ses partisans. Dans un paysage politique où les images comptent souvent plus que le fond, le passage de Trump chez McDonald’s pourrait être considéré comme un coup de génie.
De plus, cet événement a permis à Trump de dresser un contraste entre lui et ses adversaires. Alors qu’Harris et d’autres leaders démocrates ont parlé de l’importance de se connecter avec les Américains ordinaires, Trump a adopté une approche différente, utilisant ses apparitions publiques pour incarner cette connexion en temps réel. Ses critiques peuvent appeler cela un coup de théâtre, mais pour bon nombre de ses partisans, cela montre que Trump est prêt à retrousser ses manches et à interagir avec les gens qu’il aspire à représenter.
Réaffirmer le message populiste de Trump
La visite de Trump chez McDonald’s fait partie d’un récit populiste plus large qui a défini sa carrière politique. Ses partisans le voient comme un homme d’affaires devenu politicien, qui n’a pas peur de défier l’élite politique, et ce passage dans un fast-food est une manifestation visuelle de ce message. En travaillant chez McDonald’s, Trump se positionne une fois de plus comme un outsider, quelqu’un qui est prêt à rompre avec les normes politiques traditionnelles pour atteindre les Américains ordinaires.
Le ton populiste de cet événement chez McDonald’s s’aligne également avec les critiques constantes de Trump à l’encontre de l’administration Biden et du Parti démocrate, qu’il décrit comme déconnectés des réalités de la vie de la classe ouvrière. Dans le récit de Trump, il est le candidat qui comprend et représente les « Américains oubliés » — les ouvriers, les propriétaires de petites entreprises et, oui, même les employés de fast-food.
Alors que l’élection approche, l’apparition de Trump chez McDonald’s sert de dernier effort pour galvaniser sa base et créer un contraste net avec ses rivaux. C’est une stratégie à haut risque et à haute récompense qui vise à capitaliser sur son image d’homme du peuple, même si l’exécution de cette démarche est soigneusement orchestrée.
En fin de compte, le coup de McDonald’s reflète l’approche de Trump à la campagne électorale. Il n’a pas peur d’utiliser le spectacle et le symbolisme pour faire passer son message, et il comprend le pouvoir des images dans la formation de la perception publique. Reste à voir si ce geste se traduira en votes, mais il est clair que Trump utilise une fois de plus des tactiques non conventionnelles pour rester sous les projecteurs — et dans l’esprit des électeurs.
Dans le chaos des derniers jours de la campagne, la visite de Trump chez McDonald’s peut sembler une diversion légère, mais en réalité, c’est un effort calculé pour attirer les électeurs de la classe ouvrière, provoquer ses adversaires politiques et renforcer le message populiste qui a défini sa marque politique. Et si l’histoire nous a appris quelque chose, c’est que les paris de Trump se révèlent souvent payants d’une manière inattendue.