À l’horizon 2030, de nombreux métiers devront s’adapter à une évolution démographique, à l’accélération des innovations et à des exigences économiques nouvelles. Derrière les chiffres se dessinent des changements qui concernent aussi bien les travailleurs que les fonctionnaires, les formateurs, les employeurs et les futurs diplômés.
La population active vieillit
Depuis plusieurs années, les quinquagénaires et sexagénaires prennent une place croissante dans la population active. Aujourd’hui, les personnes âgées de 50 à 64 ans représentent environ un tiers de celle-ci. Ce phénomène s’explique notamment par le recul de l’âge de départ à la retraite et la volonté politique de maintenir les seniors dans l’emploi. Les générations qui partent sont bien plus nombreuses que celles qui arrivent.
Les départs des générations nées entre les années 1940 et le début des années 1960 — les fameux baby-boomers — modifient la composition des effectifs. La pyramide des âges du monde professionnel, historiquement large à la base et étroite au sommet, se renverse progressivement.
Désormais, on observe une diminution du nombre de jeunes travailleurs et une augmentation continue du nombre de salariés âgés. Résultat? Un taux de chômage élevé pour les jeunes en France.
Réorganiser les métiers pénibles et valoriser les compétences rares
L’enjeu n’est pas seulement quantitatif. Le défi consiste aussi à améliorer les conditions d’exercice dans les métiers physiquement ou mentalement éprouvants, qui souffrent d’un manque chronique d’attractivité. Les professions où les départs sont les plus nombreux — entretien, bâtiment, enseignement, soins — peinent à séduire les nouvelles générations. L’absentéisme, l’usure professionnelle et la faible reconnaissance salariale y sont souvent pointés du doigt. Les métiers dits « essentiels » pendant la pandémie, paradoxalement, sont encore parmi les moins valorisés.
Dans cette optique, le ministère du Travail a lancé un plan spécifique à destination des salariés expérimentés. Il ne s’agit pas uniquement de prolonger la carrière des plus âgés, mais de reconnaître leur expertise et de faciliter la transmission des savoirs. Les entreprises sont invitées à réfléchir à de nouvelles formes de tutorat, d’évolution interne, voire de réorganisation des horaires pour les salariés en fin de carrière.
Les métiers les plus touchés par les départs
Certains métiers seront confrontés à une véritable hémorragie. Entre 2019 et 2030, les projections annoncent près de 490 000 postes à pourvoir dans l’entretien. Dans cette catégorie, la très grande majorité — soit environ 462 000 — correspond au remplacement de salariés partant à la retraite. Du côté de l’éducation, ce sont près de 328 000 départs qui sont attendus, sans que les créations de postes ne permettent de compenser intégralement cette vague de sorties.
Ces chiffres posent des questions sur la capacité du pays à assurer la continuité des services fondamentaux. L’éducation, en particulier, fait face à une baisse du nombre de candidats aux concours de recrutement, ce qui limite le renouvellement des effectifs. Dans les établissements les plus fragiles, cela se traduit déjà par des classes non remplacées, des recours fréquents à des contractuels et une démotivation croissante du personnel.
$Les métiers liés à l’informatique, au numérique et à l’intelligence artificielle sont en plein essor pourtant. D’ici 2030, environ 190 000 postes seront à pourvoir dans le domaine, dont plus de 115 000 créations nettes. Contrairement aux secteurs traditionnels, ces professions attirent des profils jeunes, qualifiés, souvent mieux rémunérés, avec des perspectives de mobilité et de formation continue plus fréquentes.
Les métiers d’ingénieurs, de développeurs, d’experts en cybersécurité ou encore de spécialistes en science des données devraient continuer à se développer, portés par la généralisation des usages numériques et les besoins croissants en innovation. Le faible taux de départ à la retraite dans ces professions contribue également à leur stabilité : on y observe un vieillissement moindre, car la majorité des actifs sont issus des générations récentes.
Objectif transition écolo’ : De nouveaux métiers à l’horizon!
La stratégie nationale bas carbone va devenir un moteur de création d’emplois. Jusqu’à 200 000 postes pourraient émerger dans des domaines directement liés à la transition écologique : la rénovation énergétique des bâtiments, l’agriculture durable, les énergies renouvelables, ou encore les métiers liés à la recherche environnementale. Ces emplois nécessiteront des compétences spécifiques, qui ne sont pas toujours enseignées aujourd’hui dans les filières classiques.
Cela suppose un important travail d’anticipation pour adapter les parcours de formation initiale, mais aussi pour renforcer la formation continue. Les reconversions professionnelles devront être facilitées, pour que les travailleurs dont le métier devient obsolète puissent rapidement rebondir vers des secteurs porteurs.
Chaque année, environ 800 000 postes seront à pourvoir, tous secteurs confondus. Une part significative ne sera pas liée à la croissance de l’activité, mais au remplacement des départs. Il devient donc indispensable de revoir les outils d’orientation scolaire et professionnelle, pour mieux informer les jeunes sur les métiers porteurs, sur les conditions réelles de travail, et sur les possibilités d’évolution.
Les pouvoirs publics devront également favoriser la mobilité intersectorielle, en permettant à ceux qui souhaitent changer de métier de le faire plus facilement. Cela implique une meilleure lisibilité des passerelles entre métiers, des aides à la reconversion et des dispositifs de validation des acquis réellement accessibles. Par ailleurs, le retour à l’emploi des personnes inactives ou éloignées du marché du travail — en raison de problèmes de santé, de responsabilités familiales ou de découragement — constitue un autre levier à activer.