Un beau voyage rime souvent avec découverte de lieux connus. Pour ceux qui sont déjà allés à Madrid, vous aurez bien entendu parlé du monastère de l’Escurial comme le lieu d’échappatoire des Madrilènes lorsque la capitale devient trop chaude.
Ce lieu, peu connu des touristes étrangers, doit sa réputation à sa taille gigantesque et à l’originalité de son architecture. Néanmoins, rares sont les personnes qui connaissent le véritable trésor du monastère de l’Escurial: les séries de peinture.
L’Escurial ou le siècle d’or de l’Espagne
Le monastère de l’Escurial est la meilleure interprétation architecturale qui reflète l’idéologie du siècle d’or de l’Espagne. Construit par Jean-Baptiste de Tolède sous l’ordre de Philippe II, ce lieu allie les influences flamandes et italiennes typiques de la Renaissance. Il est divisé en plusieurs monuments, tous reliés les uns avec les autres par de longs couloirs.
Les lieux d’exposition des peintures sont : la basilique, la bibliothèque, le cloître ainsi que le palais d’Autriche. C’est à une heure bien matinale qu’il faut découvrir ces fresques, dessins et peintures, qui se prêtent au silence et à la méditation, tels que le faisaient les moines Jéronimites qui habitaient et priaient pour le salut des âmes des familles royales.
Les peintures se divisent en trois catégories : les fresques, les collections de grands maitres, puis les peintures de guerre.
La première exposition est celle des fresques. Arrivé dans la bibliothèque, c’est un spectacle qui se trouve au-dessus de nos têtes et qui appelle à la contemplation. Avec comme architecte Juan de Herrera et comme peintre Peregrino Tibaldi (élève de Michel-Ange), l’œuvre doit être à la mesure de leur réputation. Ce lieu extraordinaire est dédié aux sept arts, ces derniers étant la source de savoir la plus poussée qu’il y avait à l’époque, la puissance du royaume d’Espagne était de ce fait, bien exposée.
Dans ces sept arts, nous en retrouvons trois qui sont particulièrement impactants: la théologie, représenter par une femme montrant du doigt les saintes écritures ; la philosophie, peinte en femme et accompagné de grands penseurs grecques, mais aussi présenter sous la dualité de l’école d’Athènes (académicien contre stoïciens) ; la grammaire, présenter de manière rude et sévère, comme étant la mère du langage, ect.
Certaines scènes sont tirées de l’Ancien Testament et du Nouveau Testament, suivant ainsi la réflexion humaniste de la Renaissance qui se proclame nouvelle sans renier l’ancien. Quelques-unes de ces scènes ont une très nette influence de Michel-Ange, comme la construction de la tour de Babel ou bien encore l’Allégorie à la rhétorique. Dans les deux on y retrouve les mêmes traités de l’anatomie et des nues que ceux présents dans de la chapelle Sixtine.
Tout cela, n’est naturellement qu’un aperçu des nombreuses représentations que l’on trouve sur ce plafond et dans le cloître, pour le plus grand plaisir de notre imagination.
Dans la seconde catégorie, nous retrouvons les collections de grand maître, il est important de savoir que toutes les peintures ne sont pas exposées au grand public, car beaucoup sont en cours de restauration. Néanmoins, celles qui sont présentes sont exposées dans trois très grandes salles nommées : salles capitulaires, où nous admirons les œuvres du Greco, Titien, Rubbens, Secher, Tintoretto, etc.
Parmi les peintures présentes, deux sont particulièrement émouvantes, la dernière cène de Titien et le martyre de Saint-Maurice du Greco.
La dernière cène de Titien est une œuvre extrêmement touchante, où l’artiste a su rendre à cet instant son recueillement. Les couleurs y sont merveilleusement bien conservées, on y voit les fameux bleus de l’artiste qui jaillissent de la toile. Les tableaux du Greco sont dans un tout autre style, on y retrouve les canons allongés et les couleurs très vives de cet artiste, preuve de ses origines grecques et de son étude pour la peinture byzantine.
Le tableau de Saint-Maurice témoigne de la lutte contre l’hérésie et de la bataille de Saint-Quentin, qui fut à la base de la construction du monastère. La peinture divise le plan divin du plan terrestre, ce dernier présenté sous plusieurs micros scènes, qui racontent l’histoire de la bataille et la conversion des infidèles.
Les peintures de guerre de l’Escurial
La dernière catégorie de peinture n’est pas la moindre puisque l’Escurial renferme la plus grande collection de peinture de guerre du pays. En effet, après avoir fait la guerre aux quatre coins de l’Europe, Philippe II décide de commémorer ces victoires sur les champs de bataille par des fresques et des peintures aux dimensions monumentales témoignant de l’art de la guerre.
Parmi ces œuvres, celle qui compose la salle des batailles sont particulièrement grandioses.
En effet, les fresques qui recouvrent ses murs furent réalisés par Nicolas Granello, Fabrizio Castello et Lazaro Tavarone, trois artistes italiens originaires de Genève. On y retrouve le langage artistique de la Renaissance: éléments grotesques, omniprésence de l’art et de la science de la guerre. Les deux œuvres relatent la bataille de Higueruela pendant la reconquête de la province de Grenade ; Les campagnes de Saint-Quentin en honneur de laquelle se construit le monastère de l’Escurial; pour finir, on y voit la conquête du Portugal et celle des îles Açores.
L’Escurial sous son allure austère, présente au public des œuvres uniques, aux dimensions gigantesques, chacune avec des personnalités bien définies qui s’inscrivent dans la tradition artistique de la renaissance ou l’Homme y est considéré comme le centre de toute chose. Ce lieu rempli d’histoire n’attend que les visiteurs qui sauront l’apprécier à sa juste valeur.