Le ton est donné : Friedrich Merz veut un combat sans concession contre l’Alternative für Deutschland. Le chancelier allemand, chef de la CDU, a réuni son parti à Berlin pour lancer l’offensive avant une série d’élections régionales décisives. « L’AfD est notre principal adversaire. Elle ne tend pas la main ; elle veut nous détruire », a-t-il martelé, fermant la porte à toute idée d’alliance.
Née en 2013, l’AfD est devenue une force politique que personne ne peut ignorer. Deuxième aux législatives de février dernier, elle devance désormais la CDU dans plusieurs sondages. Sa progression, autrefois impensable dans un pays marqué par le souvenir du nazisme, s’est accélérée à l’est, mais gagne aussi du terrain à l’ouest. Dans certaines régions, le parti anti-immigration et pro-russe séduit des électeurs qui, il y a peu, votaient encore conservateur.
L’est du pays en ligne de mire
Merz sait que 2026 sera une année charnière. Cinq Länder renouvelleront leur assemblée, dont la Saxe-Anhalt et le Mecklembourg-Poméranie occidentale, où l’AfD caracole en tête. À l’ouest, elle pourrait bien devancer les sociaux-démocrates et talonner la CDU. « Ce sont des questions de fond qui nous séparent, pas des nuances », a insisté Merz, dénonçant une formation « autoritaire et fidèle à Moscou » qui, selon lui, veut « un autre pays ».
Markus Söder, dirigeant de la CSU bavaroise, a renchéri : « L’AfD veut notre place, pas le bien de l’Allemagne. »
Des conservateurs avaient récemment évoqué l’idée d’une coopération partielle avec l’extrême droite, arguant que le fameux “cordon sanitaire” instauré en 2018 n’avait pas freiné son ascension. Merz les a recadrés sans détour. « Nous nous en démarquerons sans ambiguïté », a-t-il répété, estimant que céder à l’AfD reviendrait à « vendre son âme ».
Cette fermeté n’a pas plu à tout le monde. Alice Weidel, coprésidente de l’AfD, a répliqué en accusant Merz de « ruiner imprudemment les fondements de l’économie allemande » et d’être prisonnier de son alliance avec les sociaux-démocrates. « Merz et ses fonctionnaires se battent contre nous, nous, nous nous battons pour l’Allemagne », a-t-elle lancé sur X, fidèle à son style provocateur.
L’immigration, ligne de fracture
Si Merz s’affiche en rempart contre l’extrême droite, il lui emprunte parfois ses thèmes. Lors de la dernière campagne législative, il avait fait de l’immigration un argument central, évoquant les “problèmes” liés à l’insécurité après plusieurs attaques commises par des étrangers. Quelques semaines avant le scrutin, il avait même accepté les voix de l’AfD pour faire passer une motion sur la politique migratoire, brisant le tabou du front républicain.
Depuis son arrivée au pouvoir, il a durci le ton : contrôles frontaliers renforcés, naturalisations plus strictes, et discours plus tranché sur l’intégration. Ses propos récents sur les “problèmes dans le paysage urbain allemand” ont choqué la gauche, qui l’accuse de reprendre la rhétorique de ses adversaires. Loin de se rétracter, Merz a assumé : « Je n’ai rien à retirer. Tout le monde sait de quoi je parle quand la nuit tombe. Les enfants et les filles peuvent le confirmer. »


