Les Sud-Coréens se sont rués vers les urnes comme si des places pour un concert de BTS étaient en jeu. Ils ont donc eu un taux de participation record, une carte électorale divisée et un président qui peut dire merci à la colère des quinquagénaires.
Une participation folle en Corée du Sud
« Cette fois, le taux de participation a été très élevé, l’un des plus hauts de l’histoire. Cela indique que les électeurs coréens ont participé avec beaucoup d’enthousiasme à l’élection », explique la Professeure Eunjung Lim.

La politologue pense que cet engouement démocratique rappelle les premiers votes post-démocratisation, avec un taux de participation tel qu’il reflète une volonté populaire de s’exprimer, voire de sanctionner.
Un peu comme si l’électorat avait décidé collectivement : “Ça suffit, il faut que ça change – ou qu’on confirme notre camp, mais on y va tous.”
La “Pennsylvanie” coréenne a choisi son camp
Pour la Professeure Lim, la région du centre (où se trouve son université à Kongju) est un véritable “swing state” sud-coréen, comparable à la Pennsylvanie aux États-Unis. Cette année, elle a basculé du côté du Parti Démocrate, tout comme Séoul, ce qui contribue fortement à la victoire du président. Une bascule qui confirme que ce centre reste le terrain de bataille électoral le plus stratégique du pays.
Le vote anticipé pour pallier à un stress
« Les régions conservatrices ont montré leur réticence à voter par anticipation, préférant voter le jour même, tandis que les régions pro-démocrates ont enregistré un taux de participation anticipée très élevé. »
C’est fracture comportementale : Le vote anticipé séduit dans d’autres démocraties pour sa praticité, mais il semble en Corée du Sud chargé d’une dimension idéologique. Les conservateurs restent bien sûr attachés à la solennité du scrutin le jour J.
Une jeunesse élitiste partage aussi ses voix…
« Les étudiants de l’Université nationale de Séoul ont majoritairement soutenu le candidat démocrate, mais on voit également une division nette selon le genre. »
La Professeure Lim insiste sur ce point : même au sein des élites universitaires, la polarisation reste forte, encore une preuve du clivage générationnel et genré plus profond. La colère de la tranche des 40-50 ans, elle, a agi comme un moteur électoral massif contre le président en place.
Résultat? Un nouveau président qui va se confronter aux Occidentaux.
Fraîchement élu avec un score retentissant, Lee Jae-myung s’est envolé pour le G7 au Canada afin d’y jouer les chefs d’État influents.
Mais entre un rendez-vous manqué avec Trump et une élection déjà entachée d’accusations de fraude, le président sud-coréen démarre son mandat comme un jongleur marchant sur un fil – sous le regard méfiant de tout un peuple.
Lee Jae-myung, qui se présentait récemment comme un modéré pour séduire les électeurs centristes, n’a jamais caché son aversion pour la présence américaine en Corée du Sud.
Lors de la campagne présidentielle de 2022, il qualifiait les troupes américaines de « force d’occupation », les accusant même de perpétuer la domination japonaise après la Seconde Guerre mondiale.
Aujourd’hui, malgré son discours de maintien de l’alliance militaire avec Washington, nombreux sont ceux qui y voient une stratégie de court terme.
Son échec à rencontrer Trump au G7 a renforcé le camp de ses conseillers anti-américains, qui prônent un rapprochement avec la Chine et la Corée du Nord. Déjà, des marches dénonçant un « vol électoral » entachent sa légitimité.
Si Lee persiste dans sa ligne idéologique, la Corée du Sud pourrait connaître un basculement diplomatique historique, en rupture frontale avec l’axe occidental.