Macron en vacances aujourd’hui à Agadir? Non, le chef d’Etat est en mission diplomatique.
Lors de sa visite officielle de trois jours au Maroc, le président français Emmanuel Macron a consolidé l’alliance entre Paris et Rabat à travers une série d’accords économiques stratégiques.
Ce rapprochement permet à la France de renforcer ses liens économiques et diplomatiques avec le royaume chérifien, une dynamique qui, toutefois, risque de creuser davantage le fossé avec l’Algérie, déjà en froid avec la France. Ce déplacement marque un tournant dans la politique étrangère française en Afrique du Nord, où les équilibres régionaux sont influencés par le dossier sensible du Sahara occidental et la compétition d’influence entre le Maroc et l’Algérie.
Le Maroc renforce ses liens avec la France
Devant le Parlement marocain, à Rabat, le mardi 29 octobre, Emmanuel Macron a défendu le « partenariat d’exception renforcé » scellé avec le roi Mohammed VI, soulignant qu’il doit s’étendre à des questions cruciales comme l’immigration illégale et la coopération consulaire. Cette initiative témoigne de la volonté de Paris de faciliter le retour des ressortissants marocains en situation irrégulière en France, un enjeu clé de la politique migratoire française. « Nous avons besoin de davantage encore de résultats », a affirmé Macron, en insistant sur la nécessité de collaborer étroitement dans la lutte contre les trafics, y compris le narcotrafic. Ce partenariat vise ainsi une coopération judiciaire renforcée et plus rapide pour faire face aux défis sécuritaires communs.
Le sujet migratoire, cependant, reste une source de tension entre Paris et Rabat, en particulier depuis que la France a conditionné sa politique de délivrance de visas à la coopération consulaire des pays d’origine. Le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, a d’ailleurs rappelé les chiffres révélateurs : en 2023, la France a accordé 238 000 visas aux Marocains pour seulement 1 680 retours forcés. Retailleau espère obtenir un soutien plus conséquent de la part du Maroc dans le cadre de ce partenariat renforcé, le désignant comme « un pays sûr » où des réadmissions pourraient être accélérées.
Le dossier du Sahara occidental, enjeu de taille, occupe une place centrale dans les relations franco-marocaines et marque un clivage important avec l’Algérie. Lors de son allocution à Rabat, Emmanuel Macron a réitéré sa position de soutien à la souveraineté marocaine sur ce territoire disputé, affirmant que « le présent et l’avenir du Sahara occidental s’inscrivent dans le cadre de la souveraineté marocaine ». Ces propos, applaudis par les parlementaires marocains, témoignent d’un soutien de plus en plus affirmé de la France envers le Maroc, une reconnaissance qui ravive les tensions avec Alger, défenseur du Front Polisario et partisan de l’indépendance sahraouie.
Macron a toutefois insisté sur le caractère non hostile de cette position, en expliquant qu’elle ne vise aucun pays en particulier, notamment l’Algérie. En renforçant sa coopération économique dans la région, la France projette une dynamique d’investissements durables et solidaires, en particulier dans les territoires sahariens. Ce geste ouvre de nouvelles perspectives pour les entreprises françaises souhaitant s’implanter dans le sud marocain, contribuant ainsi au développement local. Pour Rabat, cet appui diplomatique et économique représente un atout stratégique pour contrer l’influence de l’Algérie dans la région.
La France s’immisce dans les affaires du Maroc.
La situation au Sahel constitue également un thème de discussion entre la France et le Maroc. Avec l’instabilité croissante dans cette région, marquée par le retrait progressif de l’influence française et la montée de nouveaux acteurs géopolitiques, Emmanuel Macron a insisté sur la nécessité de « stabiliser la région dans le respect des peuples sahéliens ». Le président français a rappelé que la France, bien qu’accusée de multiples échecs, a su, durant une décennie, empêcher l’effondrement de plusieurs États sahéliens confrontés à des menaces terroristes. Son discours prône une nouvelle approche fondée sur un « partenariat humble », centré sur des projets de développement pour la jeunesse sahélienne.
Le repositionnement de la France dans le Sahel intervient dans un contexte de rupture avec trois pays de la région — le Niger, le Mali et le Burkina Faso —, désormais dirigés par des gouvernements militaires ayant opté pour une politique plus indépendante. Dans ce cadre, le Maroc pourrait jouer un rôle clé en tant qu’allié stratégique, capable de soutenir la stabilité régionale et de collaborer avec la France dans le cadre de nouvelles initiatives de développement au profit des populations sahéliennes.
Tout comme les enjeux diplomatiques, la dimension économique de la visite de Macron au Maroc est significative. Le président français a proposé au roi Mohammed VI de sceller un nouveau « cadre stratégique » en 2025 à l’occasion du 70e anniversaire de la déclaration de Celle-Saint-Cloud, qui consacra l’indépendance du Maroc. Ce nouvel accord devrait permettre de structurer les relations franco-marocaines autour de priorités communes dans les domaines économique, social et environnemental.
À l’issue de cette première visite d’État au Maroc, plus de 10 milliards d’euros d’engagements financiers et de contrats commerciaux ont été annoncés. Ces 22 accords bilatéraux illustrent l’intensification de la coopération économique entre les deux pays, avec des retombées attendues dans divers secteurs, notamment l’infrastructure, l’énergie renouvelable et la technologie. La France confirme ainsi son rôle de partenaire économique privilégié du Maroc, renforçant sa présence dans une région clé pour ses intérêts stratégiques et économiques en Afrique du Nord.
Cette alliance renforcée entre la France et le Maroc est cependant perçue d’un mauvais œil par l’Algérie, dont les relations avec Paris sont déjà tendues. La prise de position française en faveur de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental est perçue par Alger comme une atteinte à ses intérêts et à son soutien au mouvement indépendantiste sahraoui. La nouvelle dynamique franco-marocaine risque d’accentuer la rivalité entre Rabat et Alger, un antagonisme qui impacte les relations diplomatiques de la France dans le Maghreb.