Le prince Harry, duc de Sussex, a essuyé un revers judiciaire majeur ce vendredi , lorsque la Cour d’appel britannique a confirmé que l’État n’était pas tenu de lui fournir une protection policière financée par les contribuables lors de ses séjours au Royaume-Uni. Le jugement met un terme à une bataille juridique entamée contre le ministère de l’Intérieur et contre le comité exécutif chargé de la sécurité des personnalités royales et publiques (RAVEC), un organe où siègent également des représentants de la Maison royale.
La décision de justice ne laisse guère de place au doute. Le juge Geoffrey Vos a reconnu que les arguments du prince étaient « émouvants », mais a conclu qu’ils ne constituaient pas une base juridique suffisante pour invalider la décision initiale. Il a estimé que le raisonnement suivi par RAVEC était logique et fondé, notamment au regard du statut particulier du prince Harry, qui a volontairement quitté ses fonctions officielles en 2020 pour s’établir aux États-Unis avec son épouse Meghan Markle.
Désormais, toute protection dont il bénéficie au Royaume-Uni repose sur des arrangements privés, sur mesure, sans implication des forces de police ni du contribuable. À l’issue de la procédure, Harry se retrouve non seulement débouté, mais aussi contraint de régler ses frais d’avocats ainsi que ceux de l’État, pour un montant total dépassant 1,5 million de livres sterling — une facture conséquente, même pour un membre de la famille royale.
Un prince mécontent mais toujours médiatisé
Peu après cette décision, le prince s’est exprimé dans une interview à la BBC, dans laquelle il a répété qu’il ne se sentait pas en sécurité pour revenir au Royaume-Uni avec sa famille. Il a déclaré : “Je ne peux pas envisager un monde dans lequel je ramènerais ma femme et mes enfants ici.” Pour lui, les conditions de sécurité actuelles sont insuffisantes, et son équipe privée installée aux États-Unis ne peut pas accéder aux renseignements sensibles de la police britannique, ce qui limiterait leur efficacité.
Harry a dit, non sans dédain, que cette situation aurait pu être évitée si son père, le roi Charles III, avait simplement accepté de “laisser les experts faire leur travail“. Il suggère donc que la main du souverain, indirectement, pèse lourdement dans la gestion de son sort. Il a ajouté : “ Il aurait pu s’écarter, laisser les spécialistes décider, et cette affaire aurait été réglée depuis longtemps. “
Le spécialiste en langage corporel Jesus Enrique Rosas a remarqué sur sa chaîne Youtube qu’Harry rejetait beaucoup la faute sur son père et que même s’il dit que son “statut n’a pas changé”, il pouvait maintenant être surnommé un “prince de Temu” au vu du fait qu’il n’exerce aucune fonction royale mais exige tout de même les privilèges qui viennent avec cette fonction qu’il a abandonnée en 2020.
Il fait directement porter la responsabilité à son père, déjà affaibli par un cancer, dont le diagnostic a été rendu public en 2024. Dans un passage particulièrement de l’interview, le prince affirme ne plus savoir combien de temps il reste à son père à vivre, tout en déplorant que ce dernier ne veuille plus lui adresser la parole.
Buckingham Palace a répondu sobrement à travers un communiqué publié dans The Sun, affirmant que “toutes ces questions ont été examinées à plusieurs reprises avec rigueur par les tribunaux, et les conclusions ont toujours été les mêmes “.
Aucune mention directe n’a été faite des propos du prince, ni de ses allusions à une possible réconciliation. Le silence feutré du palais est très adéquat face au ton accusateur du prince Harry, cela montre la distance désormais irréconciliable entre le duc et sa famille.
Le prince Harry, l’homme qui veut être libre, mais pas anonyme
Depuis son départ de la monarchie active, le duc de Sussex tente de concilier une indépendance superficielle et sa visibilité publique. Il vit en Californie dans une propriété luxueuse, mène des projets médiatiques très lucratifs — de la série documentaire avec Netflix à ses mémoires à succès Spare — et continue de s’exprimer dans les médias pour expliquer sa version des faits. Il demande l’anonymat et la sécurité, tout en multipliant les apparitions. Il dénonce une institution froide et peu compatissante, tout en réclamant les privilèges liés à son ancien rôle.
Le paradoxe saute aux yeux : s’il a choisi de quitter la monarchie et de s’extraire du protocole, pourquoi réclame-t-il encore les avantages liés à une fonction qu’il a quittée volontairement ?
La protection policière n’est pas une marque d’amour familial, c’est un service public coûteux, accordé sur critères stricts. Le Royaume-Uni est confronté à des défis budgétaires immenses et a jugé que le maintien de cette protection pour un résident étranger sans fonction officielle n’était ni justifiable ni équitable.
Un lourd héritage de méfiance et de ressentiment
Le prince Harry a comparé son traitement à un “traquenard” orchestré par les institutions britanniques. Il se dit victime d’un système fermé, qui l’aurait sacrifié pour préserver d’autres membres de la famille. Il évoque souvent la mort tragique de sa mère, Lady Diana, fuyant les paparazzi, comme une blessure toujours vive qui façonne sa relation au danger et à l’exposition médiatique. Il voit dans la décision de RAVEC une volonté de contrôle, voire de punition.
Son avocate, Me Shaheed Fatima, a même fait état d’une menace d’Al-Qaïda contre le prince, et d’un incident survenu à New York en 2023 où Harry et Meghan auraient été poursuivis en voiture. Ces éléments n’ont pas convaincu les juges. Le tribunal a estimé que la décision de réduire son niveau de protection était une conséquence ” prévisible ” de son retrait de la vie publique royale.
Un rejet judiciaire et surtout familial
Dans son interview, Harry répète aimer son pays, vouloir y revenir, et regretter de ne pouvoir y emmener ses enfants. Il dit vouloir “la réconciliation” et affirme qu’” il n’y a plus de raison de se battre“. Ses actes semblent parfois contredire ses paroles. En attaquant les décisions gouvernementales en justice et en exposant publiquement les dissensions familiales à des fins monétaires, en publiant des révélations personnelles, il creuse chaque fois un peu plus la distance qui le sépare des siens.
Les relations avec son frère, le prince William, sont quasi inexistantes. Son père ne lui parle plus, selon ses propres dires. Il dit pourtant espérer que ses enfants puissent un jour découvrir leur pays d’origine. Mais il reconnaît aussi que cela est peu probable, compte tenu des circonstances.
Un destin royal sans royaume
Le prince Harry ne cesse de rappeler qu’il est ce qu’il est : un Windsor, un fils de roi, un ancien prince actif, un homme à part. Il ne peut échapper à son identité, mais refuse d’en assumer les contraintes. Ce statut ambivalent est précisément ce qui agace nombre de ses concitoyens. Il bénéficie d’un immense privilège, d’une fortune personnelle, d’une notoriété mondiale. Et pourtant, il réclame encore l’assistance de l’État britannique.
La décision de la Cour d’appel vient confirmer une réalité que beaucoup de Britanniques avaient déjà intégrée : on ne peut avoir le beurre, l’argent du beurre, et l’escorte de police à vie sans rendre de comptes. Le prince Harry refuse d’accepter cette logique et se marginalise davantage. Il reste célèbre, certes. Mais à mesure que les mois passent, il semble surtout de plus en plus seul.