La France a été secouée par les récentes attaques terroristes menées par le Hamas le 7 octobre, ravivant le traumatisme des attentats de novembre 2015 à Paris. Cependant, l’impact de cette attaque et du conflit subséquent dépasse largement le cadre de la terreur, touchant profondément les divisions politiques, sociales et religieuses en France. Les décideurs craignent que les retombées continues de la guerre ne fassent qu’aggraver ces tensions. Alors que la guerre en Ukraine avait suscité un rare consensus au sein de la population française et de la classe politique, le conflit à Gaza risque d’exposer les profondes divisions qui la sous-tendent.
Les communautés juives et musulmanes françaises sont en première ligne
La France abrite une population d’environ six millions de musulmans, dont la plupart sont d’origine nord-africaine. La cause palestinienne a depuis longtemps tenu une place particulière dans le cœur des musulmans français, qui s’identifient souvent à la souffrance des Palestiniens à travers leurs propres expériences de discrimination. Ainsi, la destruction continue causée par le siège israélien de Gaza a suscité une colère personnelle et profonde au sein de la communauté musulmane française. Juste trois mois après les émeutes violentes qui ont suivi le meurtre d’un jeune musulman français par la police, les autorités françaises craignent une nouvelle explosion de violence imminente.
Les inquiétudes concernant la communauté juive et la radicalisation
Il existe en particulier de graves préoccupations quant à la sécurité de la communauté juive française, la plus importante en Europe, qui pourrait être la cible d’actes antisémites. Plus de cent actes antisémites ont été signalés dans les cinq jours suivant l’attaque du Hamas. Les autorités françaises craignent également que certains groupes extrémistes puissent instrumentaliser les développements en cours à Gaza pour radicaliser des individus vulnérables et commettre des actes terroristes sur le territoire français. Bien qu’il n’y ait aucune connexion confirmée avec les événements à Gaza, une nouvelle attaque terroriste islamiste a frappé la France quelques jours seulement après les événements en Israël, suscitant des inquiétudes quant à d’autres attaques à venir. En revanche, de nombreux musulmans français craignent que les actes atroces perpétrés par le Hamas ne nourrissent l’islamophobie et renforcent la montée des discours d’extrême droite en France qui associent l’islam et la migration à un risque de terrorisme.
Les divisions politiques en France face à la situation à Gaza
Dans ce contexte, les réactions du public aux événements à Gaza et en Israël sont devenues un sujet de vives divisions politiques dans le débat public français. Alors que le gouvernement et la plupart des partis politiques ont condamné fermement l’attaque du Hamas et soutenu le droit d’Israël à se défendre, certaines voix politiques d’extrême gauche ont été vivement critiquées pour attribuer une certaine responsabilité de l’attaque à l’occupation israélienne des territoires palestiniens. Le parti d’extrême gauche La France Insoumise, qui compte une importante base électorale parmi la minorité musulmane française, s’est abstenu de qualifier l’événement d’attaque terroriste, mettant en péril l’alliance politique des partis de gauche, les NUPES. En revanche, le parti d’extrême droite Rassemblement National (RN) a condamné vivement l’attaque, cherchant ainsi à dissimuler son propre passé antisémite et négationniste de l’Holocauste. La position du RN vise également l’électorat juif, qui, selon des études récentes, se tourne de plus en plus vers la droite, voire l’extrême droite, après avoir longtemps voté à gauche.
Craignant que les débats n’attisent davantage les tensions en France, le président Emmanuel Macron a prononcé une allocution présidentielle solennelle à la nation le 12 octobre, appelant le pays à “rester uni” et déclarant que “ceux qui confondent la cause palestinienne avec la justification du terrorisme commettent une triple erreur : morale, politique et stratégique”. En faisant la distinction entre le soutien à la cause palestinienne et le soutien au Hamas, Macron a tenté de s’adresser à la fois aux communautés musulmanes et juives. Cependant, à mesure qu’Israël poursuit son offensive à Gaza, provoquant une crise humanitaire majeure, il pourrait devenir de plus en plus difficile pour Macron de maintenir cet équilibre.