La situation en Irlande du Nord continue de dégénérer. Pour la troisième nuit consécutive, plusieurs villes ont été secouées par des affrontements entre habitants et forces de l’ordre.
À Ballymena, où tout a commencé, les policiers ont essuyé des jets de feux d’artifice, de bouteilles et de pierres. Des dizaines de jeunes se sont regroupés dans les rues, face aux véhicules blindés des forces de l’ordre, qui ont dû recourir à des chiens et à des canons à eau pour contenir les groupes les plus agressifs.
Les échauffourées ont causé des blessures à plusieurs agents : on compte déjà 32 policiers blessés depuis le début des incidents. Six personnes ont été arrêtées, mais aucun détail n’a encore été donné sur les interpellations de la nuit dernière.
Larne : un centre de loisirs visé et incendié
La violence ne s’est pas limitée à Ballymena. À Larne, à une trentaine de kilomètres, un groupe de jeunes cagoulés s’en est pris au centre de loisirs de la ville.
Ce bâtiment servait d’hébergement d’urgence pour des familles déplacées par les troubles des nuits précédentes. Le feu a été mis à l’entrée du centre, ce qui génère d’importants dégâts matériels. Les flammes ont surtout touché la zone d’accueil, mais la fumée a noirci l’intérieur sur une large superficie. Heureusement, les familles ont pu être relogées à temps, selon les autorités locales.
Les forces de l’ordre ont dû quitter les lieux un moment après avoir été visées par des projectiles, avant de revenir en nombre avec des renforts équipés pour le maintien de l’ordre. Une cinquantaine de personnes ont assisté sans intervenir à la scène de destruction.
Une agression présumée à l’origine de la colère
Tout est parti lundi d’une manifestation après une agression sexuelle présumée. La victime : une adolescente. Deux garçons d’origine étrangère, mineurs, ont été présentés devant le tribunal de Coleraine. Ils ont donné leur identité à travers un interprète roumain. Leur avocat a indiqué qu’ils nient les faits qui leur sont reprochés.
L’enquête suit son cours, mais les rassemblements qui se voulaient pacifiques au départ ont vite dégénéré en violences. Pour les enquêteurs, ces débordements freinent la recherche de la vérité. Le chef adjoint de la police, Ryan Henderson, a dénoncé ces actes qui, selon lui, ne font qu’ajouter à la douleur de la victime et de sa famille. Il a mis en garde : ces violences risquent de compromettre les chances d’un procès juste.
Des accusations de racisme qui divisent la population
Les responsables politiques et policiers s’accordent pour qualifier ces violences d’attaques motivées par la haine contre les communautés étrangères.
Les forces de l’ordre racontent des actes de brutalité dirigés à la fois contre les minorités et contre les agents eux-mêmes.
Le climat en Irlande du Nord est extrêmement tendu dans des quartiers où cohabitent de longue date des populations diverses. Ces dernières années, l’Irlande et l’Irlande du Nord ont accueilli un nombre croissant de nouveaux arrivants, ce qui n’a pas aidé à créer de cohésion sociale : De nombreux pays européens dénoncent des politiques d’accueil migratoire qui n’étaient pas bien réfléchies et qui ne prenaient pas en compte la capacité d’accueil du pays, ni la capacité à s’intégrer des nouveaux arrivants.
Nombreuses sont les personnes qui condamnent quand même fermement les destructions, en disant qu’elles ne feront qu’aggraver les divisions.
Le ministre des Communautés, Gordon Lyons, a dénoncé l’incendie du centre de loisirs comme une attaque contre l’ensemble des habitants qui en bénéficiaient. Le leader de l’opposition, Matthew O’Toole, a annoncé vouloir saisir le commissaire aux standards au sujet des propos tenus par Lyons sur les relogements liés aux événements. Il pense que les enjeux sont trop graves pour de telles polémiques.
Des rues de l’Irlande du Nord transformées en champs de bataille
À Ballymena, la nuit a vu des affrontements qui ont duré plusieurs heures. Les policiers ont avancé en formation pour disperser les groupes les plus déterminés. Des habitations ont également été touchées : des vitres ont volé en éclats sous les jets de pierres. La ville garde encore les stigmates des deux nuits précédentes : mobilier urbain arraché, routes jonchées de débris, façades noircies par la fumée.
Les Nord-Irlandais sont partagés entre inquiétude et colère. Beaucoup redoutent que la situation échappe à tout contrôle si aucune mesure forte n’est prise rapidement. Certains craignent aussi que ces scènes servent d’argument aux autorités pour durcir les lois sur la sécurité et réduire encore la marge d’expression des citoyens mécontents.